Faubourg 36 par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Au printemps 1936, le "Front Populaire" remporte les élections. Le gouvernement formé, les premières mesures sociales entrent en application notamment le repos hebdomadaire et la baisse du temps de travail. Face à ce programme, une opposition virulente et parfois fascisante se manifeste brutalement, semant la terreur en créant de sérieux incidents. Dans un faubourg du nord de Paris, trois ouvriers au chômage Pigoil, Milou et Jacky qui vivent chichement voient enfin l'avenir avec plus d'optimisme. Ceux-ci travaillaient au "Chansonnia", un music-hall fermé depuis plusieurs mois pour cause de faillite. C'est alors qu'ils décident d'occuper l'établissement et de monter seuls un spectacle à succès en partie grâce à leur "découverte" Douce, une jeune fille devenue chanteuse par hasard. L'entreprise s'avère périlleuse d'autant qu'en plus de leurs problèmes personnels, nos trois ouvriers se heurtent à un certain Galapiat proche des opposants politiques les plus virulents organisés en mafia. Tous les moyens seront alors bons pour faire échouer cette louable entreprise. Le "Chansonnia" survivra-t-il?


Nous voici plongés au milieu d'une époque durant laquelle l'euphorie gagna le cœur des uns comme le désir de revanche hanta la pensée des autres. Trois êtres à la dérive reprennent tout à coup espoir en pensant à la magie de la mer qu'ils espèrent enfin découvrir pour la première fois. Pourtant, pour nos trois héros, malgré un idéal qui leur tend les bras, ce n'est pas aussi simple. Pigoil rencontre des problèmes conjugaux après le départ de sa femme et le retrait de la garde de son fils. Milou est un révolutionnaire de tout crin, fortement buté contre la société bourgeoise. Quant à Jacky, il est un gentil influençable. Il est de plus pitoyable en se croyant imitateur de talent et pourtant celui-ci lui fait bien défaut. Malgré leurs différences nos trois hommes reviennent sur les lieux de leur ancien travail le théâtre "Chansonnia" pour remettre en route le spectacle. L'opération réussit et la presse parle de cet évènement rarissime mais l'évènement justement attire l'attention de ceux qui rêvent à l'effondrement du "Front Populaire". Alors tout va être bon pour faire échouer cette tentative. Douce, la jeune révélation de la chanson, fait un tabac. Qu'à cela ne tienne! Le fourbe et cruel Galapiat va courtiser et exploiter Douce afin de saborder le succès que remporte grâce à elle le spectacle présenté au "Chansonnia". Il pousse au désespoir Pigoil, marqué par les échecs répétés de sa vie. Il tyrannise Milou amoureux de Douce et devenant gênant pour son entreprise de démantèlement, enfin il se sert de la faiblesse de Jacky en le liguant contre ses amis mais mal lui en prendra. Pendant ce temps Douce se fait un nom dans la chanson pendant que Jacky, Milou et Pigoil vivent des fortunes diverses qui ne sont pas forcément le reflet de la liberté et du bonheur dont ils pensaient enfin profiter. En effet le ver est dans le fruit, le fascisme rôde, organisé, brutal et pervers. La période faste sera comme la revue musicale du "Chansonnia" brève mais vécue avec enthousiasme.


Que l'on ait apprécié ou non "Les Choristes"*, ce nouveau film de Christophe Barratier était attendu avec beaucoup de curiosité par le public. Il est certain qu'une fois encore le réalisateur ne fait pas dans la dentelle lorsqu'il s'agit de planter le décor, néanmoins il est vrai que nous ne sommes pas invités par le réalisateur à suivre un cours magistral sur cette brève période . Tout est très conventionnel autant dans l'attitude des personnages que dans leurs propos. Toutefois l'intrigue ne manque pas d'intérêt et on se laisse facilement prendre au jeu de celle-ci grâce à son côté dramatique servi par une interprétation brillante. La démagogie et l'incohérence ont cette fois ci été évitées et de ce fait tout paraît crédible donc plus prenant. L'interprétation s'avère particulièrement excellente à commencer par ce trio de chômeurs pleins de bonne volonté, campés par Gérard Jugnot, Kad Merad et Clovis Cornillac, inséparables et solidaires malgré leurs personnalités totalement opposées et les embûches de la vie. Nora Arnezeder est éblouissante dans son rôle de petite provinciale débarquant à Paris sans le sou et s'avérant une super meneuse de revue. Bernard-Pierre Donnadieu est fort convaincant dans le rôle d'un personnage cruel, calculateur et cynique. Il est toujours agréable de revoir Pierre Richard cette fois-ci jouant le rôle d'un auteur-compositeur reclus devant sa "TSF". Mention également à Maxence Perrin, le fils au destin incertain de Pigoil pour son naturel . Les compositeurs pour la musique, Reinhardt Wagner et pour les chansons, Franck Thomas , nous entraînent dans un flot musical "rétro" tantôt réjouissant tantôt émouvant très réussi.


Si ce nouveau film de Christophe Barratier n'est pas le chef-d'oeuvre de l'année, il n'en demeure pas moins que cette réalisation est attachante et qu'il serait dommage de la négliger. N'hésitez donc pas à utiliser la machine à remonter le temps jusqu'en 1936, le "Chansonnia" vous attend pour une dernière séance!

Grard-Rocher
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le 12 avr. 2013

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