Fish Tank par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Je vous présente la vie tourmentée de Mia, une jeune fille d'une quinzaine d'années. Elle vit avec sa mère, une femme dépravée et adepte des "aventures", sa petite sœur Tyler et un brave chien. Elles habitent un quartier sensible de Londres où les tours sinistres côtoient les terrains vagues. Les cas sociaux sont légion et la famille de Mia entre dans cette catégorie. La jeune fille asociale, parfois brutale dans ses actes et vulgaire dans ses vociférations, n'a aucun repère. Renvoyée de son école, elle tente de survivre tant bien que mal, sa passion se limitant au hip-hop. Un jour sa mère ramène à la maison Connor, son nouvel amant. Celui-ci se montre sympa et rassurant vis à vis de Mia. Elle voit enfin le gros nuage noir de son existence s'éloigner un peu, la confiance revient. Reste à savoir si ce nouvel arrivant parviendra à redonner un peu d'espoir à Mia, le dialogue semblant se lier entre eux...


Le contexte est vraiment particulier pour cette jeune fille délaissée qui ne peut s'intégrer dans la société. C'est un personnage sans foi ni loi qui tente d'évoluer dans un monde qui lui est hostile, un monde qui d'ailleurs lui rend bien ses excès de comportement, de langage et de brutalité. La société des hommes est inaccessible pour elle et seule une vielle jument liée à une chaîne dans un campement de son quartier trouve grâce et pitié auprès d'elle. Mia, sans cesse rabrouée chez elle par sa mère, a choisi par la force des choses le clan des paumés, le clan des laissés pour compte. Il y a bien le hip-hop qui entraîne chez elle une véritable passion et qui parvient à illuminer son visage, c'est tout...
L'horizon va pourtant s'éclaircir lorsque sa mère ramène un soir Connor, un type qui lui paraît assez ouvert au dialogue. Il arrive par son attrait pour le hip-hop à lui redonner un début de confiance et lui provoquer un sentiment amoureux qui semble réciproque. Mia paraît reprendre goût à une vie plus normale. Moins agressive, moins violente, elle va jusqu'à oser se soumettre à un jury pour passer une audition afin de montrer son savoir-faire dans sa danse favorite avec la bénédiction de Connor. Néanmoins cela provoque les réticences de sa mère. Seulement pour Mia, bien malgré elle, tout ne sera jamais simple. Le monde des adultes qui l'entoure est pervers. La vie et l'attitude de l'adolescente vont s'en ressentir. Même la vengeance peut paraître bien fade à la vue des dégâts provoqués par les ignominies de son entourage.


C'est une société en ruine dans un bien modeste quartier populaire que nous décrit avec beaucoup de soin Andrea Arnold. Elle a su saisir dans cette œuvre toutes les facettes susceptibles de détruire une adolescente pour le restant de ses jours. Mia, interprétée de façon magistrale par Katie Jarvis, s'élève seule, elle a la haine des autres mais au détour du son de sa musique préférée ou des malheurs d'une jument son regard s'humanise un peu et l'on y perçoit même un brin de tendresse. Cette tendresse elle va la retrouver en faisant confiance à Connor joué par Michael Fassbender. Il va devenir le copain, son soutien moral, le père qu'elle n'a peut-être jamais connu. Tyler, sa petite sœur presque aussi vulgaire que Mia est très bien incarnée par Rebecca Griffiths et l'on peut se douter que pour elle, le chemin sera aussi tortueux. Quant à la mère, Kerston Wareing, très sexy et dévoreuse de mecs, elle ne semble pas avoir conscience des désastres qu'elle provoque auprès de ses enfants par sa vie dissolue. Mais peut-être ses filles sont-elles un embarras ?


C'est donc un film que je conseille vraiment. La réalisatrice britannique, Andrea Arnold, nous fait un magnifique cadeau avec cette œuvre très dure mais très attachante. De plus les prises de vues sont remarquables et contribuent à rendre cette histoire encore plus poignante.


Ce film a obtenu :
◾Prix du jury au Festival de Cannes 2009.

Créée

le 4 juin 2015

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