L'enfant sauvage

Un requin ? Un porte-avions ? Mais non, c'est Godzilla !

Il est dur de se décider pour savoir si, oui ou non, ce Godzilla est à la hauteur des espoirs qu'il avait amenés. En réalisant un film de kaijus, ces grosses bébêtes japonaises, le jeune américain (parait-il très talentueux) Gareth Edwards ne peut éviter la comparaison avec le récent Pacific Rim. Et à la vision du film, le parallèle n'en est que plus fort, puisque comme dans ce dernier l'action se localise sur l'arc pacifique, entre Philippines, Japon, Hawaï et Californie, permettant ainsi encore une fois un mélange des cultures humaines.

Le point fort du film est incontestablement l'expérience visuelle qu'il propose. C'est simple, du début dans la zone contaminée japonaise aux vues dans San Francisco en passant par les jungles d'Hawaï, tout est magnifique. J'aimerais dire qu'on en prend plein la vue mais on pourrait mal me comprendre : il ne s'agit pas ici de gadgets 3D à sensations fortes (j'ai d'ailleurs vu le film en 2D, c'était moins cher) mais bien d'un réel sens de l'esthétisme. Le clou du spectacle étant bien entendu les monstres, leurs lignes parfaites, leurs combats titanesques. Après avoir soutenu le regard de Godzilla, on ne s'étonne pas de retrouver Andy Serkis au générique. Petit coup de cœur aussi pour la capacité spécifique du MUTO qui permet de magnifiques scènes.

Expérience visuelle mais pas auditive. J'ai trouvé la BO bien fade : rien d'original, aucun thème reconnaissable, vraiment le minimum syndical pour appuyer les différentes scènes. Là où dans certains films comparables la BO suffit à atteindre un niveau supérieur (bonjour Jurassic Park), rien de tel ici, et je suis le premier à le déplorer. Parce que putain, les images qui claquent couplées avec une musique du tonnerre, ben ça avait suffit à faire de Pacific Rim un bon film malgré le gros boulet qu'il trainait, son scénario.

Le scénario de Godzilla, justement, est plutôt prévisible (c'est à la fois un blockbuster et un film de monstre), cependant la fin rattrape un peu le coup. On ne va pas dire que c'est un blockbuster intelligent, mais les actions prévisibles des marines toujours aussi bourrins sont finalement remises en question par le dénouement, qui sans révolutionner quoi que ce soit vient remettre un peu l'humanité à sa place. Vous en conviendrez, c'est quand-même agréable.

Si on met de côté les pseudo-théories du complot selon lesquelles un monstre peut se balader en liberté dans une métropole japonaise et être déguisé en bombardement atomique, et la radioactivité comme un gaz-que-si-on-peut-respirer-c'est-qu'y-en-a-pas (faut arrêter de déconner un peu), on se laisse finalement prendre à ce scénario qui sans casser trois pattes à un lézard est plutôt sympathique.

Car le plus important, ce sont les monstres, et Edwards l'a bien compris en ne nous les montrant pas, laissant monter la tension pendant une bonne heure après laquelle on a enfin droit à les voir en entier, dans toute leur splendeur. C'est cette première heure qui fait toute la qualité du film, qui permet de poser le background et d'attiser la curiosité, c'est grâce à elle qu'on pourra apprécier ensuite ces combats de titans, depuis notre juste place, celle de fourmis seulement de passage.

Finalement, il ressort de ce film une impression de demi-réussite qui vient un peu éclipser la magnificence du spectacle : dommage que le scénario n'aille pas plus loin et que les personnages soient aussi cliché, parce que c'est bien tout ce qui manque.