À l'instar de David Bowie déclarant ne pas faire du rock mais s'en servir, Peter Greenaway utilise le cinéma comme un excipient. Architectural et graphique, son principe actif baroque et bavard prend ici la forme d'un livre d'images foisonnant.

C'est précisément le sujet de Goltzius et la Compagnie du Pélican : un projet de livre illustré qui donne naissance à une succession de saynètes évoquant les contes érotiques de l'Ancien Testament. Destinées à convaincre le Marquis d'Alsace d'investir dans le projet, elles servent la métaphore proposée par Greenaway, les artistes d'un côté, le mécène de l'autre, le voyeurisme, l'art, le pouvoir, l'argent.

L'image est riche, multiple, infiniment travaillée. C'est de la dentelle, des superpositions de calques, des surimpressions, des cadres découpés, une organisation géométrique du cadre. Les jeux de symétrie sont souvent impressionnants, parfois grandioses.

L'érotisme est avant tout littéraire, fantasmé, intellectuel. Et si les corps des comédiens sont souvent nus, c'est une nudité blanche, froide, dépourvue d'épiderme et de chair. On parle de sexe, on simule des accouplements, une sodomie, une décapitation, mais sans désir. C'est l'idée du sexe et du péché mais sans le sexe.

On peut se laisser porter par la partition baroque de Greenaway ou décrocher complètement. C'est toute la singularité d'un cinéma qui tient davantage du théâtre et de la peinture, un cinéma détourné en quelque sorte. Quoi qu'on en pense, on ne pourra pas nier les multiples qualités formelles d'un film volontairement singulier.
pierreAfeu
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le 25 sept. 2014

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