Il y eut 2001: L'Odyssée de l'Espace, de Kubrick, il y eut Apollo 13, de Ron Howard, et puis il y eut Alfonso Cuarón, discret mais cinéphilement connu pour son travail sur Les Fils de l'Homme. Aujourd'hui, le cinéaste mexicain règne désormais en maître sur l'espace grâce à ce travail long de 4 ans, bousculant les codes, asservissant les critiques, sidérant nos esprits. Etude d'un film culte en devenir...

Tout commence par un plan-séquence de 17 minutes dans lequel George Clooney et Sandra Bullock s'affairent à installer un nouveau circuit d'imagerie médicale sur la station Hubble, perchée à 598 kilomètres au-dessus de la Terre. La vue est splendide et leurs mouvements tranquilles, jusqu'à ce qu'un flot de débris en provenance d'un satellite russe vienne percuter la structure, éjectant fissa le personnage de Sandra Bullock dans le vide incommensurable du vaste monde intersidéral...

"A 600 km au-dessus de la Terre,
il n'y a rien pour porter le son
ni pression atmosphérique,
ni oxygène.

La vie dans l'espace est impossible."

Personne ne peut vous entendre, vous êtes plus que jamais totalement seul et inaudible, avec 10% d'oxygène comme décompte fatal. Planquée dans son cube de 3 mètres sur 3 pendant des jours et des jours de tournage, Sandra Bullock délivre une performance incroyable afin de rendre compte de la solitude de son personnage et d'imager par le regard un contexte de base inexistant sur le plateau. Mes respects...

Pour ce qui est de la prise de vue, on aura rarement eu droit à d'aussi beaux plans-séquences, au sein desquels s'alternent points de vue internes et externes, histoire de nous faire héros autant que spectateur. A noter également une excellente gestion des hors-champs, un travail attentif sur le contraste des distances, et un rythme parfait, de sorte qu'on oscille régulièrement entre le ballet majestueux de l'homme en suspension et le vertige cosmique du Dr Stone, à tout moment prisonnière de l'espace.

La 3D ? On l'oublie bien vite tant l'artificiel cède ici la place au réalisme. Ce film est résolument bâti pour en utiliser tous les aspects, que ce soit dans l'esthétique de chaque tableau ou dans l'adrénaline des séquences les plus palpitantes. Saluons aussi une BO tout ce qu'il y de plus réussie. Entre cavales sur piano et tambours en renfort, Steven Price vient lentement aspirer notre respiration à coup d'infra-basses et conférer au cadre de l'action toute sa pesanteur. L'expression "à couper le souffle" est toute trouvée pour décrire ici le ressenti du moment.

Jamais on a été aussi proche du cinéma, jamais sinon maintenant l'on a pu toucher le fictif du doigt comme s'il devenait réel. C'est précisément ce qui donne à l'oeuvre de Cuarón toute son originalité: une expérience résolument novatrice dans la vaste monde du 7ème art, non mécontent de compter Gravity parmi ses chefs-d'œuvre. Parce que c'est génial, haletant et jamais vu. Plus qu'un simple film, Gravity est une machine à sensations, un phénomène visuel. Mieux, un petit pas pour la 3D, un grand pas pour le cinéma.
Maître-Kangourou
9

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Créée

le 23 oct. 2013

Modifiée

le 26 oct. 2013

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