Cette comédie russe a des graphiques critiques pour le moins instables sur les sites spécialisés ; du n'importe quoi, du tout ou rien. Et au visionnage, on comprend pourquoi : c'est une parodie de l'absurde qui ne jure que par le bord**ique. De quoi séduire autant que dégoûter. Et l'accroche a intérêt d'être efficace ou bien c'est typiquement le genre de films qu'on coupe avant la fin. Longtemps avant.


En ce qui me concerne, j'ai tout de suite apprécié l'humour, ridiculisant sans être ridicule (si l'on avait eu à faire ce film dans nos contrées, on n'aurait pas hésité à donner dans l'humour potache et digestif). Seul regret à ce propos : la densité. Les scènes sont accélérées et les gags se succèdent frénétiquement, si bien qu'on a peu de temps pour les apprécier.


Mais malgré la fascination que peut exercer le film, on se rendra compte qu'il est en fait morcellé de petits défauts : le scénario se construit au fur et à mesure, constituant son premier bémol. Au moins l'intrigue tient-elle la route jusqu'à la fin, même si elle vacille par moments, comme si la réalisation s'était faite sous l'emprise aigre-douce et fluctuante de quelque substance. Le son est saturé, les bruitages mal synchronisés et trop forts, même si cela ajoute en quelque sorte à la dimension comique. On nous fait souvent le « coup de l'arrière-plan » : les acteurs sont visiblement filmés devant un écran où défile une scène préfilmée.


Le reste est brillant. Un titre original alternatif du film est « Шпион нашего времени » (« Un Espion de notre temps », ma traduction) et cela détaille bien les anachronismes et l'autodérision qui en sont des ingrédients primordiaux. Parsemé d'éléments textuels qui ne perdent même pas de leur lustre sous l'effet du sous-titrage, il est comparable en bien des points à un film que je vais citer (mais ne vous emballez pas, ni le propos ni l'ambiance ne sont les mêmes) : Deux heures moins le quart avant Jésus-Christ (Jean Yanne, 1982). Sauf qu'on est ici deux heures moins le quart avant la défaite allemande. La musique est aussi excellente.


Bref, c'est typiquement le genre de films qu'il faut voir avec une longue expérience de cinéphilie afin d'exorciser au mieux les aspects bêtement rébarbatifs et de savoir trouver les vrais défauts sans se laisser démonter par la saturation de l'œuvre en tout. Non que les personnes qui ont détesté soient pour autant des néophytes ; il est au contraire excessivement aisé d'être soûlé par la grandiloquence hyperactive et souvent dénuée de sens de la chose. Alors malgré le génie permanent qui a abouti a son existence, défauts et exagération conduisent à beaucoup relativiser l'avis critique.


Quantième Art

EowynCwper
6
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le 23 juin 2018

Critique lue 219 fois

Eowyn Cwper

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