Pas évident de se faire une idée sur Robert Rodriguez. Artisan adepte du système D, cinéaste tout-terrain, stakhanoviste dépassionné, imposture qui adore jouer les copistes,...Trente ans après sa découverte, la question n'est pas tranchée. Et Hypnotic va filer quelques cartouches supplémentaires à ses détracteurs.
Rodriguez confie avoir eu l'idée de ce dernier long-métrage il y a 20 ans lors d'une projection de Sueurs Froides. Entre-temps, le réalisateur a livré une bonne douzaine de productions en tout genre (comédie familiale, grindhouse gorasse, film d'action, cyberpunk,...), et a juste intégré la touche Nolan à son scénario. En mode mineur. Il peut lui repiquer quelques éléments de scénario (le héros qui veut retrouver son enfant) ou images iconiques avec l'environnement replié sur lui-même, son Hypnotic tient du sous-Inception. Ou sinon d'un pitch de La Quatrième Dimension emballé comme un épisode des Experts Miami. On a du mal à croire que le film a été budgété à 65 millions de dollars, ce qu'on donne à Guillermo Del Toro ou Juan Antonio Bayona pour nous coller un uppercut visuel. La comparaison avec les deux collègues fait très mal, eut égard au spectacle famélique offert par Rodriguez, pourri par un manque d'inspiration criant, une construction répétitives et des twists téléphonés. L'ironie de l'histoire voulant que la seule trouvaille amusante consiste à une relecture façon Dogville des pétaradantes aventures de l'inspecteur Rourke. Hélas, ça arrive très tard et l'angle méta ne semble pas intéresser plus que ça le metteur en scène (et il s'est inspiré d'Hitchcock ?). Ni Ben Affleck, qui nous sert sa plus belle mine abattue et rien de plus. Alice Braga et William Fitchner s'efforcent de sauver les meubles. On ne peut pas dire qu'ils y arrivent, mais à leur décharge il n'y a pratiquement rien à sauver. Vingt ans dans les cartons, ça nous donne un long-métrage qui a vingt ans de retard, au script poussiéreux, une facture insignifiante, des reprises pas fines de Nolan ou de l'excellente série Severance et un comédien fatigué. Son retentissant échec au box office est la conclusion logique d'une stratégie aberrante. Pourquoi se risquer la sortie en salles alors qu'il eut été plus adapté à une diffusion streaming sur n'importe quelle plate-forme où sa présence n'aurait pas dénoté avec la profusion de produits lisses et oubliables déjà en ligne ?
S'il n'éclaircit pas vraiment sur le cas Robert Rodriguez, Hypnotic confirme néanmoins bien des points noirs qu'on peut lister sur sa filmographie. Ce dernier film, on le classera dans la catégorie de ses petits plaisirs personnels qui ont surtout coûté un max pour ne pas rapporter grand chose. Pas si grave, Rodriguez a déjà quelques projets pour les années à venir...