Avec l'étonnant (et passé totalement inaperçu) film d'action Faster, Dwayne "The Rock" Johnson avait montré qu'il pouvait jouer la gravité sans susciter l'hilarité. Avec Infiltré, l'acteur franchit un nouveau cap dans sa carrière en campant un entrepreneur quadra père de famille et passablement embourgeoisé, qui décide de collaborer au péril de sa vie avec la DEA pour obtenir la libération de son rejeton emprisonné pour trafic de beuh. Un rôle lourd, et potentiellement riche en séquences dramatiques, dans un film où sa carrure herculéenne n'est pas exploitée, ni même mentionnée.
Résultat ? Sans fioritures. Avec sa gueule de grand-frère baraqué que tu crois quand il te dit que tout va s'arranger, The Rock convainc, tout comme Infiltré au rayon des séries b musclées, d'ailleurs. Initiallement risquée pour d'évidentes raisons, la formule 75% drama / 25% action fonctionne plutôt bien, laissant au personnage principal le temps de s'étoffer et d'exister, avant de l'envoyer au casse-pipe chez les narcotraficants patibulaires, avec un sujet de dissertation sous le bras : jusqu'où seriez-vous prêt à aller pour sauver votre enfant de dix ans d'enfer dans un pénitencier ? The Rock a les boules (= on traite son fils comme un vulgaire chicanos de droit commun), The Rock doute, The Rock se lance, The Rock a de nouveau les boules mais dans un autre sens (= les gars autour de lui ont des fusils et l'air pas net), et au final, The Rock ne rompt pas.
Mais il n'est pas tout seul, et croisera sur son chemin le toujours génial Barry Pepper dans un rôle de flic infiltré à barbe de cowboy un peu plouc, Madame Susan Sarandon dans un rôle de procureur carnassière, et surtout Jon Bernthal (le Shane de The Walking Dead) dans le rôle d'un ex-taulard en quête de rédemption que le héros utilise pour entrer en contact avec le milieu. Montagne de nerfs à fleur de peau, Bernthal est l'effet spécial du film, la sauce moutarde sur une côte de boeuf déjà bien nourrissante. Lors du dernier quart d'heure, où tout part en vrille, et sautent enfin les plombs qui n'en pouvaient plus d'attendre, l'acteur a même son moment de gloire dans un jolie scène de fusillade aux côtés de l'inénarrable Michael Kenneth Williams (Omar de The Wire). The Rock, lui, s'amuse dans une course de bagnole généreuse, diablement efficace et étonnament anti-hollywoodienne.
A la fin, on pourra toujours questionner la moralité de cette sympathique série b (qui verra comprendra)... mais certainement pas se plaindre de s'être ennuyé.