Eux c’est Hitman. Et nous, c’est a hitman...

...Leur symbole c’est un assassin mutique sans poils, nous un tueur silencieux au crâne rasé. Eux ont un agent d’Interpol pour la confession, nous un cinéaste en disgrâce. Comme nous, ils emploient des déguisements et des subterfuges pour mener des assassinats, mais eux ajoutent un code barre à la nuque de leur protagoniste. Nous pas : on le fait nature.

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Bon, on va tâcher de ne pas faire trop long et pour ne pas vous imposer une perte de temps de vie, disons-le de but en blanc : Entrevue avec un tueur à gages est un navet ennuyeux et dispensable. Vous pouvez vous arrêtez là, je comprendrai. Pour les plus vicieux d’entre vous, tâchons de voir ce que propose ce film.

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A hitman est un film indépendant avec un seul homme à sa barre, Perry Bhandal, un apprenti cinéaste qui vend son travail comme étant, je cite : « La fusion du cinéma traditionnel avec une technologie de pointe et une intelligence artificielle générative pour offrir des longs métrages de classe mondiale. » Il essaye de se vendre le bonhomme et on le comprend. Les fonds pour produire un film sont complexes à trouver et Bhandal voulait exposer dans ce film les conséquences de la violence via un tas d’astuces, de la parodie de l’agent 47 à l’emploi d’un acteur ayant joué dans Hellboy 2 pour gratter quelques billets de plus, en passant par la promotion via une projection en salle lors du festival de Cannes de 2012, puis l’export de son métrage dans des pays étrangers. Il les vend avec énergie, ses savons avec surprise à l’intérieur. Sitôt le DVD en main ou le catalogue en ligne arrêté sur le titre, tout est déjà gagné pour le roublard. Vous venez de participer à la mise en lumière de ce non-événement du cinéma.

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C’est arrivé près de chez vous

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A hitman nous présente, sous une étrange impression de déjà-vu, la grande confession d’un assassin désireux de raconter sa vie et ses flashbacks. On voit le petit Viktor faire son regard de méchant blondinet en ayant déjà les mêmes soucis de dettes non-honorées que son père. Père qui bat la maman, truands dans l’immeuble, pan pan ça tue, bang bang ça frappe. Un jeudi comme un autre en Roumanie, pays où se déroule l’enfance du chérubin. Petit hitman va vite prendre le chemin d’un opportuniste de film de gangster, sans la voix off de l’école scorcesienne ni les musiques entraînantes du vieux Bukarest. Un habillage sonore constant d’une platitude telle qu’on aurait préféré une bande-son de bruits de bagnoles et klaxons accompagne tout le film, sans pertinence. J’en veux pour exemple cette séquence, au dernier tiers du métrage, où le clip de romance molle entre Viktor et sa copine se contera d’un morceau de piano hors-propos et imperturbable de légèreté, y compris quand l’assassin hésitera à exécuter sa petite-amie endormie parce qu’il vient d’apprendre qu’elle était enceinte.

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Car ne vous attendez pas là à l’histoire d’un truand attachant. Malgré ses airs de Pascal le Grand Frère et une genèse qui montre qu’il a eu une vie de merde, Vicky est de base fini à la pisse. A peine assez grand pour presser la sonnette d’un appartement que déjà il tire dans la tête des adultes qui n’ont pas le pognon que son nouveau patron et père de substitution réclame. Ce dernier doit même intervenir dans le lieux du grand nettoyage pour arrêter le môme avant qu’il termine les enfants plus jeunes que lui encore. Il n’y a pas de quoi souhaiter à cette merde d’être déshumanisé d’avoir une vie heureuse et les viscères du bon côté du nombril jusqu’à la fin de son existence, mais à la décharge du film, ces scènes de violences sont plus une façon de montrer la violence, un poil osée de surcroit, que de s’en frictionner la fibre sadique. Du reste, presque toutes les exécutions, assez nombreuses, seront hors champ ou filmées trop rapidement pour offrir la satisfaction d’un bon meurtre, comme d’une bonne scène correctement filmée.

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Devenu  grand et dégarni, Vik se met à laisser couler une larme quand ceux qu’il pensait ses amis le trahissent. Un coup dur venant de gens qui exécutent des collègues de criminalité dès qu’ils oublient la combinaison de leur mallette pleine de fric lors d'un deal (exemple authentique) ou qui gardent des gamines mortes dans leur coffre après usages. De là à penser qu’ils peuvent trahir un psychopathe inexpressif pour des questions d’argent ou d’arrangements entre mafias, nous étions en droit de partager la naïveté de notre beau dégarni soudainement frappé de la folie des hommes. Soit, le reste du film est une succession de scènes d’action dont la bande-annonce vous montre le meilleur tout en vous laissant penser que c’est le montage promotionnelle qui rend les confrontations trop brèves. Outre une petite bagarre dans une cuisine avec strangulation filmée en semi-hors champ, tout se règle avec un coup ou un tir. Du John Wick sans le talent de chorégraphe et qu’on ne me prétexte pas l’envie d’exposer une violence plus réaliste, plus documentaire. C’est arrivé près de chez vous aussi faisait simple et percutant niveau exécutions tout en offrant un discours condamnant la violence du tueur. Ici nous n’avons ni la débrouillardise d’un Benoît Poelvoorde, ni la truculence d’un Jack Reacher aux traits de Tom Cruise.

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Car le défaut principal et qu’un manque flagrant de budget ne peut excuser, c’est que A hitman est ennuyeux. Les dialogues sont indigents, les personnages aussi fades qu’antipathiques et il n’y a aucune ambition sur le plan formel. Partout on voit la même lumière blafarde d’une série allemande dans un hôpital ou un couloir désert de bureaux génériques. Les décors n’ont aucun relief et les quelques astuces déployées sont de la repompe du Hitman originel. On nous présente plusieurs ellipses avec le même talent que le passage d’un film pornographique entre le moment où l’héroïne découvre que son mari la trompe et celui où elle se décide à se venger par loi du talion haut. L’un d’eux (de clips) permettra même de vivre 6 mois de vie conjugale de notre Vicky d’amour entre la scène où un commanditaire ordonne la mort d’une cible et celle où la cible rencontre son assassin. Eh oui, il a attendu 6 mois pour faire son boulot urgent. On en a radié du chômage pour moins que ça. D'ailleurs, il n'a toujours pas honoré son contrat. Vik est un tueur impitoyable qui montre de la pitié.

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Rien n’est plus important que la famille

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Reste un fond de fond, avec l’envie du réalisateur de traiter son sujet sur les conséquences d’être un connard à temps plein qui finit par payer pour ses crimes d’une façon que je ne vous dévoile pas, sait-on jamais que vous comptiez toujours vous envoyer le film. Apprenez juste ce trait de caractère du protagoniste : on tue toutes les cibles, sauf si elles ont de la famille, ou un cadre avec des gens qui évoquent une famille. Psycho kid a appris de son premier massacre il faut croire et ne veut plus tuer que des gens seuls. Bon, et sa petite-amie éventuellement, mais merde quoi ! Il n’a pas mis de capote pendant tout le temps de leur relation et cette tarée couve un môme. C’est vraiment parce qu’il est un petit coeur de guimauve qu’il ne l’a pas tirée, cette balle.

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Bref, savoir le héros incapable de refroidir quelqu’un qui a une famille devrait vous faire accepter le fait que le seul malfrat épargné par notre Viktor est le type qui gardait des petites filles violées mortes dans son coffre. C’était d’ailleurs lui le mec cocaïné jusqu’aux cernes qui ne retrouvait pas la combinaison de la mallette et a ouvert la guerre entre familles. Ah, savoir que cet être a maintenant sa propre progéniture à élever n’est pas sans me rappeler que certains s'astreignent à ne pas mélanger le travail et le plaisir. Et on remercie un tueur à gages qui a magnifiquement accompli sa mission de Pascal le grand frère. Avec une rallonge, Bhandal peut rajouter une scène où Franco frappe dans un sac, tenu par son coach de vie, en chouinant sur la pression maternelle jusqu’à recevoir un calinou du héros fier de lui. Le crowdfunding est possible, Perry Bhandal vous attend sur son Linkedin. Les amoureux de Interview with a Hitman seront d’ailleurs ravis d’apprendre que deux suites sont en cours d’écriture. Offrez-lui Chat GPT pour terminer le script et il pourra lancer le tournage la semaine prochaine.

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Faut mettre un peu d’art dans sa vie et un peu de vie dans son art.

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Conscient de mon ton ironique, je ne déteste pas pour autant A hitman. C’est juste un navet qui n’a pas oublié d’être soporifique, mais qui s’en sort mieux que ces zederies putassières voulant faire croire qu’elles sont funs en ajoutant la surdose de vulgos dans le métrage. Les éléments choquants sont trop mal réalisés pour impacter le spectateur, néanmoins ils servent un propos quand ils ne se vautrent pas dans l’amateurisme incohérent du réalisateur.

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C’est dispensable, mais si vous voulez à tout prix une fanfiction de Hitman avec au moins la qualité de proposer plusieurs scènes de confrontations et que la résolution hors-champ a votre préférence, pourquoi pas ? De mon côté, j’ai tenu jusqu’à la fin et ai eu envie d’écrire dessus avant de définitivement le laisser derrière-moi. J’aurais pu l’apprécier s’il n’avait pas été victime de l’esprit margoulin de son auteur. Le vrai intérêt reste finalement la capacité de ce dernier à propager un produit à peine au niveau d’un étudiant médiocre en fin d’études de cinéma.

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Je mets deux étoiles pour l’effort des scènes d’action avec un acteur principal qui est assez physique pour ne pas sembler ridicule, les légères bonnes idées sur les passages de Vik enfant et la largesse d’esprit de considérer que ce film se veut être un besoin d’un réalisateur de dire que la violence, c’est pas bien. Bon, il veut quand même tartiner deux suites, alors je crois que la morale de cette histoire c’est que la violence c’est nul, le fric c’est mieux.

Gharrosaurus
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le 28 mai 2023

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