Rusée Jackie Brown, fabuleuse Pam Grier

Il faut quand même que je commence par avouer quelque chose : je suis moyennement fan des films de Tarantino même si je lui accorde volontiers une grande qualité, celle de renouveler certains genres de films que ce soit des polars, des films de guerre ou des westerns par leur approche et leur tonalité très particulières. Mais si, globalement, j'apprécie modérément son cinéma, c'est à l'exception, toutefois, de "Jackie Brown".

Dans la filmographie de Tarantino, "Jackie Brown" est le troisième film qui vient après le fameux "Pulp Fiction", qu'il va falloir aussi que je commente, un jour. Pour l'anecdote, j'avais découvert ce film dans l'émission "les Guignols de l'info" avant de le voir en vrai … Bon, passons …

Le premier intérêt que je vois dans "Jackie Brown", c'est un scénario très bien ficelé avec des personnages parfaitement bien définis. D'autant mieux définis qu'ils sont tous bavards et ne cessent de se dévoiler, de se répéter montrant ainsi une personnalité bien plus complexe que l'image initiale pourrait donner. L'histoire est crédible et même captivante dans cette espèce de navigation à vue pour éviter les différents écueils que ce soient les flics ou les truands. En tous cas, personnellement, je n'y vois guère de choses invraisemblables.

Les dialogues sont savoureux et ceux qui m'amusent le plus, c'est très certainement ceux de Ordell (Samuel L Jackson) et de Jackie (Pam Grier). J'emploie bien le mot "amuser" car, maintenant que je connais bien le film, j'attends les répliques cinglantes ou complètement décalées de certains des personnages. Par exemple, en vrac car ce serait trop long de tout citer, au début du film, lorsqu'Ordell fait l'éloge de l'AK47 ou de la M60 à Louis (De Niro) sur fond de film publicitaire où les armes sont présentées et manipulées par de splendides créatures en bikini.

La mise en scène me parait très réussie. À commencer par la longue entrée en scène follement esthétique (et sensuelle) de Pam Grier pendant tout le générique lorsqu'elle n'en finit pas de parcourir ces longs couloirs de l'aéroport. Il en est de même des scènes dans le grand centre commercial où Tarantino parvient à installer un suspense avec même une pointe d'angoisse. J'irai même jusqu'à dire que la triplication de la scène d'échange est une super idée qu'on finit par regarder avec un peu d'amusement aussi.

Mais c'est le casting qui est le point fort de ce film.

D'abord Pam Grier qui joue le rôle d'une femme mature un peu à la croisée des chemins. Il est temps pour elle de se prendre définitivement en main et se libérer de l'emprise de ces hommes (ces truands) pour qui elle joue un jeu dangereux qui ne peut que la mener à sa perte. J'aime beaucoup le jeu de l'actrice qui joue différents registres émotionnels qu'on peut observer dans un regard intense et flamboyant.

Samuel L Jakson dont j'ai déjà parlé. Le jeu de l'acteur est assez impressionnant lorsqu'il change brutalement de registre du mec cool, du mec en colère, du mec méfiant … La photographie accompagne bien et appuie sur l'aspect sinistre du bonhomme lorsqu'il est dans l'ombre, à peine visible, avec un regard d'une incroyable méchanceté.

Et les seconds rôles ne sont pas du tout négligés : d'abord, un Robert Foster, très placide "prêteur de cautions" pour qui Pam Grier a été un séduisant instant de rêve pas raisonnable. Quant à Bridget Fonda (la petite fille de Henry) dans un rôle de minette déjantée et camée, elle se joue de tous ces gros cons de mecs.

Mais le second rôle, qui est une idée de génie de Tarantino, c'est Robert de Niro dans le rôle d'un truand qui, après pas mal d'années passées en taule, est devenu un véritable "has been", un abruti complet. La scène où il cherche en vain sa bagnole (pourrie) sur le parking du centre commercial sous les sarcasmes de Bridget Fonda est jouissive … On voit dans un tel rôle la marque des grands acteurs qui acceptent ce genre de challenge.

Excellent film noir (sans y voir un quelconque mauvais jeu de mots) de deux heures et demie qu'on ne voit pas passer tellement l'intrigue et les personnages sont captivants.

Et puis, il y a surtout, au cas où je ne l'ai pas dit, cette fabuleuse Pam Grier que Tarantino a particulièrement bien mise en valeur.

JeanG55
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le 19 mai 2024

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