Réalisé en 1970, Je Suis Une Nymphomane reste toujours et encore l'un des fleurons de l'Âge d'Or du cinéma érotique français. 4 ans plus tard, le très célèbre (et pas très intéressant) Emmanuelle de Just Jaeckin viendra mythifier le genre en signant tout autant sa mise à mort que la naissance du X pour le grand public (le très chouette documentaire French Love dresse une excellente analyse du phénomène). Si certains films, à l'image du pertinent Les Désaxées, témoignent sociologiquement des mœurs générés par la libération sexuelle de la fin des années 1960, Je Suis Une Nymphomane, coécrit par Claude Mulot, n'en reste pas moins une sorte de roman-photos pour midinettes vierges et catholiques se posant quelques questions sur leurs pulsions sexuelles.

1970. Carole est une jeune femme inconsolable suite au décès de son frère lors du conflit en Indochine. Incomprise par ses parents et promise à un jeune homme qu'elle n'aime guère, sa mélancolie la broie à petit feu. Jusqu'au jour où elle croise un inconnu qui lui fait littéralement tourner la tête et la fait chuter dans la cage d'un ascenseur. Les inexplicables conséquences de l'accident métamorphosent son psychisme et notre jeune héroïne, auparavant coincée, devient brusquement une adepte du libertinage...

En mettant en scène un scénario d'une consternante simplicité, Max Pécas réalise pourtant un classique du genre. Grâce à son titre aussi évocateur que percutant, de très nombreux spectateurs ont répondu à l'appel lorsque le film s'est vu projeté sur les écrans lors de l'été 1971. Et pourtant, il n'y a pas grand-chose de croustillant à se mettre sous la dent. Avec son discours ultra moralisateur (la nymphomanie, c'est le mal absolu), son catholicisme de bon aloi (pas de sexe avant le mariage) et sa tiédeur en matière d'atmosphère libertine (malgré la présence active du couple échangiste Janine Reynaud / Michel Lemoine), Je Suis Une Nymphomane conserve une légèreté dogmatique face à son titre provocateur. Comme quoi, preuve qu'une bonne idée est souvent pour beaucoup dans le succès du cinéma érotique.

Reste néanmoins Sandra Julien, au corps véritablement sublime, qui s'en sort à merveille en incarnant le rôle complexe d'une jeune femme anéantie qui exprime brusquement sa sensualité. Innocence et perversion se lient ainsi pour magnifier l'érotisme naturel de la jeune actrice sous le regard amoureux de Pécas. Par contre, le "bellâtre" qui joue le rôle de l'inconditionnel "sauveur" n'est absolument plus crédible aujourd'hui. Avec ses faux airs d'Emmanuel Macron, il reste à mourir de rire en incarnant ce médecin qui souhaite ramener l'héroïne dans le droit chemin en usant d'un sérieux papal aussi confondant que risible.

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le 10 nov. 2023

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