Dubrovsky ou quand le cinéma italien parle russe

En 1832, le poète et romancier Alexandre Pouchkine commence l'écriture d'un roman qui restera inachevé, Dubrovsky - ou Doubrovski-. Ce récit ne sera publié qu'en 1841, soit quatre ans après la mort de l'auteur.


L'histoire est celle d'un jeune noble de 20 ans, Vladimir Dubrovsky, membre du régiment de l'Impératrice Catherine, qui mène joyeuse vie à Saint-Petersbourg. Rappelé d'urgence par sa vieille nourrice, il revient chez son Père mourant.


Petit propriétaire terrien, celui-ci s'est disputé avec son voisin et vieil ami Troékourov qui, par vengeance, a oeuvré pour s'approprier sa terre. Il a pour cela fait appel à un homme de loi douteux qui a rédigé une fausse revendication du domaine; Troékourov entend chasser Dubrovsky et asservir ses paysans et serviteurs.


Lorsque, pris de remords en apprenant l'état de son voisin, Troékourov se présente chez lui pour se réconcilier, Dubrovsky pense qu'il est venu le chasser de sa maison et meurt de saisissement. Fou de douleur, Vladimir jure de le venger.
Accompagné de plusieurs de ses paysans et serviteurs, il constitue une bande de bandits qui va faire régner la terreur sur la région, s'en prenant aux riches pour venger les pauvres.


A la fois drame, roman d'amour et d'aventures, Dubrovsky donnera lieu à diverses adaptations : au cinéma, à la télévision et à l'opéra.


L'oeuvre inachevé laisse la porte ouverte à des fins diverses, ce dont ne se priveront pas les différentes adaptations.
Pouchkine laissera en effet un document avec les titres des chapitres à écrire, suite à son manuscrit qui, faisant moins de 150 pages se termine assez brutalement.


On trouvera ainsi selon les adaptations :
- soit une fin heureuse avec le mariage du héros avec sa douce Mascha;
Rossano Brazzi- soit une fin triste avec la séparation de nos deux héros, suite au mariage de Mascha avec un vieux noble;
- soit une fin dramatique, où Vladimir meurt dans les bras de Mascha, mortellement blessé dans le combat final.


L'aigle noir (Aquila nera) est la quatrième adaptation du roman de Pouchkine, après l'opéra composé par Eduard Nápravník en 1895, le film de Clarence Brown avec la star du muet Rudolph Valentino en 1925 et la version d'Alexander Ivanovsky en 1935. Deux autres films suivront.


Il est à noter que seules les versions de 1925 et la présente version de Riccardo Freda utilisent le titre L'aigle noir - surnom donné au bandit masqué que Vladimir va devenir - et non Dubrovsky, titre d'origine.
Aquila Nera est donc la vision italienne proposée par Riccardo Freda, réalisation somptueuse qui met fortement l'accent sur l'aspect romanesque de l'histoire. Il fait pour cela appel à deux grands acteurs de l'époque, Rossano Brazzi dans le rôle de Vladimir et Gino Cervi dans le rôle de Petrovic ( personnage de Troékourov ).
Le film est surtout centré sur la rencontre et l'histoire d'amour entre Vladimir et Mascha, fille de son pire ennemi, puis sur la confrontation entre les deux hommes.


Portant une magnifique houppelande et arborant fièrement la chapka, Rossano Brazzi apparaît dans toute sa beauté romantique face à un Gino Cervi, plutôt convaincant en noble russe mais rustre.
Leur affrontement donne lieu à des scènes intéressantes mais parfois un peu statiques, une grande partie de l'histoire se passant dans le château de Petrovic.

On aurait aimé davantage chevaucher dans les forêts avec le bandit masqué.
Le film se suit avec beaucoup d'intérêt grâce au charme de ses héros, à la présence forte de Gino Cervi et à la vision à la fois naïve et poétique de la Russie des tsars par une réalisation italienne.


Riccardo Freda réalisera une suite, totalement inventée par rapport au roman d'origine, mettant plus l'accent sur l'action et l'aventure, "La vendetta di Aquila Nera ( La vengeance de l'Aigle noir).
A suivre......

m-claudine1
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le 6 oct. 2019

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