Je me suis endormi durant la séance.
Et je pense que c'était la meilleure chose qui puisse m'arriver.


Le rêve et la mélancolie à l'image sont deux thèmes que j'affectionne (en particulier le deuxième qui était le sujet de mon mémoire sur la photographie). Et force est de constater que ce film pousse les deux sujets au bout, à la limite de l’écœurement mais toujours avec sincérité et surtout ORIGINALITÉ. Un mot qui en 2015 n'a jamais fait aussi peur.


La Chambre interdite n'est pas loin de nous rebuter au point qu'on ne veuille plus y pénétrer du tout. On pensera notamment aux embricages de rêves qui vont à la fin du film jusqu'à 8 strates imbriquées telles des poupées russes, ce qu'Inception ou How I Met Your Mother et ses flashbacks dans le flashback n'aurait jamais osé.
Mais au lieu d'y voir juste un jusqu’au-boutisme, il est aussi malin d'y déceler une réelle intention. Celle de nous plonger dans les fameuses limbes de Nolan, mais représenté non par une simple représentation physique mais par une gêne. Le spectateur se perd dans les histoires à tiroirs, ne sais plus dans quelle histoire il se trouve, de quel rêve elle provient et surtout quand il va revenir à "l'histoire principal" (car elles le sont toute finalement). Quand cette dernière revient sur le devant de la scène à plusieurs reprises c'est une bouffée d'air frais car la narration est libérée et revient à son fil rouge. Mais il est pourtant toujours aussi délicieux de replonger dans les rêves complètement barrés qui varient les hommages aux différents cinémas de par leur narrations, leur histoire et surtout leurs univers graphiques.


Il y a de vrais trouvailles (le morphing, le chanteur sans visage, la présentation des personnages/acteurs), des contrastes saisissants (du noir et blanc à l'arc en ciel) et un émerveillement toujours renouvelé. Je n'avais pas autant aimé ce que je voyais depuis Enter The Void. Là où ce dernier retranscrivait l’expérience de la drogue, ici c'est l'univers du rêve dans toute ces formes qui est parfaitement amené à l'écran.


Rapidement sur les deux gros points négatifs du film qui m'empêchent de lui attribuer un 10 :



  • Par moment le côté un peu trop film d'auteur que je ne saurais expliquer. Soit via les dialogues, jeux d'acteurs ou autres, je n'aime jamais être pris pour un con devant un film, et le film tend malheureusement vers ça (mais c'est logique vu le thème et la technique).


  • Et surtout la musique. Bon dieu quand Sparks est passé je me suis dis VOILA. Voilà exactement le genre de trip qui rentre dans le film. J'ai toujours clamé haut et fort ma haine contre les musiques orchestrales de film que je n'arrive jamais à distinguer l'une de l'autre et qui réduisent tellement le champ des possibles.
    A certains moments j'ai cru déceler des musiques électroniques aériennes mais sinon rien. C'est parce que le film est calé sur les films d'époques ? Je ne pense pas car il emprunte aussi beaucoup au cinéma actuel et joue justement sur la balance des deux. Il était clairement possible d'offrir le même travail que celui qu'a fait Air sur Le voyage au bout de la lune. Je voyais même Bibio en compositeur de l'OST (le con avait réussi a me faire pleurer à la fin de Men, Women & Children).



Mis à part ces deux points le film reste une vraie claque, dont chacun retiendra plusieurs scènes emblématiques ce qui le place déjà au dessus de la plupart des films sortis cette année.
Alors oui je me suis endormi comme une loque. J'accusais un sérieux déficit de sommeil et quand on me pose deux heures dans une salle obscure ça augmente les chances de narcolepsie. Mais cette sieste (de quelques minutes pas plus, je ne suis pas un escroc non plus) a été bénéfique.
Déjà parce qu'après je pétais le feu, mais surtout parce l’expérience avec le film a été totale. Oui oui.
Je vous jure que se réveiller pendant ce film est totalement troublant. Impossible de savoir ce qu'on a raté, si même on s'est endormi ou si juste le film a changé de strate, si l'on a rêvé de s'être endormi ou si l'on a vu quelqu'un s'assoupir.
En fait je ne pense pas m'être endormi. Et je ne pense même pas être allé au cinéma. D'ailleurs, je rêve que j'écris cette critique.

Kaptain-Kharma
9
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le 29 déc. 2015

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Kaptain-Kharma

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