Nous avons de nombreuses lacunes quant à l’Histoire de l’Algérie. Adila Bendimerad, l’interprète de la Reine Zaphira et co-réalisatrice avec Damien Ounouri, dit à ce sujet qu’ il "manque au moins mille et un films pour raconter l’Histoire de l’Algérie. "
Jacques Philippe Laugier de Tassy, chancelier du consulat français à Alger en 1717-1718, est le premier à rapporter les évènements de la vie de Zaphira dans son Histoire du royaume d'Alger (1725). L'historicité de Zahira est mise en doute dès le XVIIIè et est plus vigoureusement rejetée depuis le XIXème siècle, Tassy ayant souvent recueilli des informations vraies et fausses ou inventé des histoires.
Le film est porté par son côté inédit. Film d’aventures, historique et romanesque, plaçant sur le devant de la scène un personnage féminin dont l’existence historique est contestée. Nous sommes en 1516, Royaume d’Alger (superbement reconstitué), le roi Salin Toumi reçoit l’aide (non désintéressée) du corsaire Aroudj Barberousse et de ses troupes pour combattre l’occupation espagnole. Cette alliance sera sans retour, le sang coulera. Les hommes se disputent le pouvoir, Zaphira leur tient tête.
C’est un très beau film, épique et intime, où se mêlent les batailles, les jeux de pouvoir, la politique et les destins individuels. Le seul petit bémol ce sont ces batailles, filmées de manière minimaliste, ce qui peut s’expliquer par un budget modeste, en tout cas pas à la hauteur des sommes réservées au cinéma américain des blockbusters du genre de « la dernière Reine » La musique, orientale, est envoutante, les costumes, accessoires et décors sont somptueux, ils nous plongent rapidement dans le Royaume d’Alger de 1516, et sont un gage de qualité tout le long du film. C’est captivant et on se surprend à éprouver de l’empathie pour Zaphira guerrière opiniâtre, épouse délaissée, mère aimante, c’est un personnage attachant.
Le scénario met en avant l’émancipation des femmes à travers le réseau d’influence mis en place par elles mêmes, allant des domestiques aux reines Zaphira et Cheega les 2 épouses du roi Selim Al-Toulmi (Salim Toumi dans le film) en passant par le chef de la garde royale Younès et Yacout sa dame de compagnie. Toutes et tous resteront d’indéfectibles support et dévouement à leur Reine. Ce réseau mettra tout en œuvre pour combattre les rêves de grandeur des corsaires et de leur chef Aroudj dont la compagne Astrid (Nadia Tereszkiewicz), est une ancienne esclave, scandinave et convertie à l’Islam. Dans un un premier temps ils aident le roi du royaume d’Alger, Salim, pour chasser l’occupant Espagnol puis se retournent contre lui. Zaphira mène de front l’éducation du Prince Yahia, son fils issu de l'union avec le Roi Salim Toumi, et la résistance contre les corsaires.