Un film qui ne casse pas des briques? Bah non, le petit LEGO vient jouer dans la cour des grands
Voilà quelques années que LEGO tente de sortir du cadre du simple jouet en s’immisçant dans le monde vidéoludique. Après quelques essais, plus ou moins réussis, d’adaptation en jeu vidéo de grands classiques ciné (« Star Wars », « Harry Potter »), voilà qu’ils ont mis en chantier leur projet le plus fou : faire un film LEGO. Alors oui, tout le monde a déjà vu des tentatives de stop-motion mettant en scène les petits bonhommes jaunes (j’ai moi-même tenter l’aventure plus jeune avec un caméscope VHS, sans montage possible derrière…) mais de là à faire un « vrai » film, de tenir la longueur, de broder une vrai histoire… C’est plus compliqué. Surtout qu’en terme de placement produit le film, de fait, peut faire peur. Bref pas sûr que ça casse des briques (je copyright cette vanne douteuse). Alors pour contrer les sceptiques, ils n’ont pas lésiné. Pas de véritable stop-motion mais une modélisation 3D qui la simule, pour décupler les possibilités, et surtout embauche de 2 gros noms du monde de l’animation ; Phil Lord & Christopher Miller, les créateurs du génial « Tempête de boulettes géantes » (et du film « 21 jump street » qui a été une sacré bonne surprise). Le petit LEGO voit donc les choses en grand.
Le choix a donc été de modéliser tout le film en 3D mais en contraignant le tout par l’utilisation uniquement de briques et d’éléments LEGO. Ainsi les nuages, l’eau, la fumée qui composent les décors sont fait eux aussi en briques LEGO. Une sorte de stop-motion-like (je copyright cet anglicisme douteux). Les seules libertés que se sont accordées les créateurs sont les mouvements de visages ou ceux (plus discrets) des bras, évitant ainsi l’aspect figé qu’aurait pu donner un strict respect des règles initiales. C’est assez déconcertant au début car l’aspect stop-motion est respecté jusqu’au légères « saccades » de l’animation. Mais au bout d’une scène d’intro (explosive) on est rôdé et même convaincu. Et le monde qui nous sera présenté, juste après cette séquence, ne fera que confirmer la bonne surprise, qui va au-delà de la forme ; audacieux, irrévérencieux, le film dépeint un monde froid, strict, et ne fait que renvoyer à notre propre système occidental consumériste et aseptisé. C’est d’une intelligence rare dès le départ, avant même de poser les bases du récit.
Le récit, d’abord classique, s’amorce sur l’avènement d’un type « lambda » qui se voit propulsé « élu » sans le vouloir d’une quête pour sauver le monde. Rien que ça. Alors oui c’est du vu et revu, mais le film joue justement sur ces codes usuels de la culture Pop (« Matrix », « Star Wars ») pour mieux tout dynamiter après. L’intégration des différents univers LEGO (City, FarWest etc) est faite grâce à une idée de génie, qui rappelle « Truman Show », et permet au film de varier les plaisirs, de ne jamais ronronner et est prétexte à tous les délires. Car à ce niveau le film fait fort, tour à tour loufoque, absurde, et savamment dialogué, le film multiplie les vannes ultra-référencées et mise sur un humour no limit à destinations des enfants (parfois) mais surtout des adultes, ces grands enfants qui s’ignorent. Courageux. Hymne à la créativité, à l’anticonformisme, la partie finale surprendra tant elle touche. L’ombre de « Toy Story » plane alors sur le film, sans en atteindre l’aura ni la poésie, mais rien que le simple fait de pouvoir faire le rapprochement, c’est déjà une victoire en soit.
Fun, désinvolte, inattendu, ce « LEGO Movie » vient chatouiller l’esprit d’enfance enfoui en chacun de nous. On s'attendait à un film qui ne casse pas des briques. Au final voici que le petit LEGO vient jouer dans la cour des grands.