La première heure de La Grande Aventure LEGO 2 est une hécatombe : l'humour est lourd, la situation de la fin du premier épisode survolée en une séquence sous voix-off lorgnant du côté de la parodie de Mad Max pas bien finaude, et les personnages sont pratiquement tous devenus des attardés gavés aux répliques communes, aux comportements censés être drôles mais bien loin de la détente, de l'autodérision et de la nostalgie que le premier épisode proposait au spectateur.
Pas spécialement beau non plus, il faut dire qu'il lui manque l'expertise unique et l'imagination débordante du duo Phil Lord et Chris Miller, Mike Mitchell pouvant difficilement égaler leur talent après nous avoir pondu L'école fantastique, Shrek 4 : Il était une fin, Alvin et les Chipmunks 3 et Les Trolls, qui une fois tous réunis n'atteindraient pas même l'efficacité de leur délirant 21 Jump Street. Étrangement, le duo semblerait être au scénario, et c'est ainsi de loin, alors qu'ils bossent sur leurs nouveaux projets, qu'on les imagine jeter un oeil sur leur bébé enlevé par les exécutifs de la Warner (qui apprécie décidément de dénaturer les oeuvres des auteurs).
D'autant plus lorsqu'on se rend compte que l'humour, largement plus enfantin et moins référencé que celui du précédent, se construit principalement sur une déconstruction du rythme des scènes : un personnage fait croire qu'il a changé de personnalité pour retrouver l'ancienne la seconde suivante pour un élément tout bête, un autre parle tout le long et c'est à la fin du discours que l'autre révèle qu'il ne l'écoutait pas, les exemples de toute sorte sortent à la pelle et font soupirer à chaque fois que se pointe une blague (le son n'aide pas pour la finesse des vannes, tant il appuie chacune d'entre elles en se coupant à chaque fois de façon peu discrète).
Sauf qu'une fois passée la première heure, le film part dans une toute autre direction que celle escomptée : certes complètement illogique et incohérente, cette décision de briser totalement les certitudes d'un spectateur qui s'attendait, avant de le voir, à un divertissement prévisible de plus était surement la meilleure à prendre pour proposer autre chose qu'une alternative avec de nouvelles blagues au premier épisode (on a même parfois l'impression d'être tombé sur un remake peu inspiré).
Ce twist en milieu de film inverse totalement les rôles et propose une réflexion surprenante sur la nature de nos préjugés, de nos attentes d'une oeuvre et de notre besoin constant de voir un affrontement violent à l'écran.
C'est là qu'il pourra décevoir : annuler la venue des grands méchants prévue depuis la fin du premier film détruit à la fois l'idée de vente de ce même climax et toutes les espérances de combat épique qu'on pouvait justement avoir.
Faire des envahisseurs des êtres plein d'amour désireux de proposer à l'univers une paix basée sur le symbole du coeur (c'est aussi naïf que ça, mais cela fonctionne dans un univers profondément enfantin) et le rythme de chansons entêtantes aux paroles affligeantes de simplicité (la mode de La Reine des Neiges a décidément touché plus largement que le simple domaine du film d'animation à princesses) et les forcer à entrer en conflit du fait de l'agressivité des LEGO retourne entièrement le discours de nos personnages principaux.
Seulement, il aurait été bien de ne pas les montrer offensifs et agressifs dans une première course-poursuite explosive et à but létal; le twist aurait alors été logique et aurait évité la plupart des incohérences de comportement dont il écope. On ne peut cependant que le remercier de conduire sur un autre retournement de situation imprévisible et très bien vu, le fameux voyage dans le temps qui propose une version agressive, solitaire et cruelle d'*Emme*t, élément scénaristique concluant bien l'évolution psychologique comique du personnage et parfaitement inclus dans les scènes de présent, qui viennent compléter avec une certaine intelligence les éléments relatés dans l'imagination des enfants et les agissements contrôlés de leurs LEGO.
C'est parce qu'il se décide à se risquer dans une toute autre direction que La Grande Aventure LEGO 2 ne peut être considéré comme une véritable catastrophe cinématographique au but purement mercantile : l'effort fait sur le scénario et cette propension à se lâcher complètement pour proposer quelque chose de neuf et de véritablement réfléchi au spectateur l'éloigne de ses débuts uniquement réservés à un public très jeune, début qui pourra gêner un certain nombre de spectateurs pas venus pour un humour aussi simplet.
On pourra lui reprocher une baisse de niveau en ce qui concerne son animation, des couleurs certes sympathiques mais peu trépidantes ainsi qu'une inclusion maladroite et forcée de nouveaux personnages cultes qu'on devine comme le nez au milieu de la figure amenées pour vendre de nouvelles figurines, et montrer toujours plus de figures connues dans un univers devenu immensément bordélique mais drôlement généreux.
N'y cherchez pas la finesse de Lord et Miller, mais bien l'efficacité des habituelles grosses productions de la Warner. Cette fois encore, le studio a remplacé les auteurs.