On ne présente plus Ken Loach, le cinéaste militant qui met en scène la misère sociale, les chômeurs qui se battent pour survivre, les travailleurs immigrés clandestins et la guerre d'Espagne ou la guerre civile en Irlande.
On ne le présente plus sauf que dans "la part des anges", il change de tonalité. Il braque sa caméra sur quatre jeunes délinquants d'une banlieue pourrie de Glasgow. Quatre jeunes condamnés à des travaux d'intérêt général pour diverses bêtises.
Parmi eux, Robbie. Violent lui-même, il se bat avec et contre des bandes violentes. L'engrenage qui ne mène nulle part sauf en prison ou à la morgue. Certainement pas à une vie normale.
Une chance lui sourit soudain : sa petite amie semble avoir une bonne influence sur lui et le couple va avoir un enfant. Déjà, là, on n'est plus dans le "Ken Loach" habituel.
Une deuxième chance lui sourit : il se révèle être un "nez" de talent pour le whisky. Là, on commence à s'interroger sur le "Ken Loach", peut-être un peu vieillissant et mollissant.
On arrive alors à une deuxième partie du film où Robbie transforme sa chance en succès. Là, on se demande ce que Ken Loach a bien pu fumer. Parce que le film prend une tournure de comédie que je ne déteste, d'ailleurs, pas.
Bon, d'accord, l'histoire (que je ne décrirai pas y compris sous la torture) devient sérieusement invraisemblable. Mais il ne faut pas s'en faire, ce n'est pas si grave : à quelques jours de Noël (pour le spectateur que je suis, bien sûr), on peut admettre que l'histoire se transforme en un conte même si les bases ne sont pas tout-à-fait "clean" sur un plan moral. Après tout, il est bien connu que le vieillissement d'un whisky en fût provoque une petite évaporation du précieux liquide, ce qu'on appelle en langage poético-professionnel, "la part des anges". Et qu'on ne va pas leur reprocher (aux anges) d'en avoir pris une petite dose pour égayer leur triste vie au paradis …
En conclusion, personnellement, j'ai bien aimé ce film d'un inhabituel Ken Loach qui présente, pour une fois, quelques côtés positifs puisque le jeune Robbie parvient à se sortir de sa misère physique et morale.
Par contre, les amateurs purs et durs de Ken Loach, où le drame du début ne peut que finir dramatiquement mal, je pense qu'il vaut mieux qu'ils passent leur chemin. À moins d'être de sérieux amateurs de whisky et de paysages écossais.