Disney sans trop de Disney

Premier gros coup de cœur en film d'animation depuis Wreck-it Ralph, des mêmes Disney Pictures qui montent soudainement dans mon estime.

On sentait déjà un virement dans leurs productions avec le satisfaisant Raiponce (Nan franchement un mec qui s'arrête en plein milieu pour demander pourquoi tout le monde chante tu sens qu'ils ont déjà pris un peu de recul), et Frozen marque pour moi un changement définitif dans les visées de Disney : plus abouti graphiquement, définitivement plus mature sans pour autant oublier le premier public visé, dans la lignée directe des meilleurs Pixar (J'ai été finalement peu surpris de voir le nom de Lasseter au générique).

J'ai envie de génocider des chatons chaque fois que je lis une critique où le scénario est montré du doigt : celui de Frozen est indéniablement le meilleur scénario sorti de chez Disney. On est à des années-lumières des histoires bêtifiantes de méchante sorcière qui en veut à la gentille princesse que le prince impersonnel vient sauver. Les personnages sont ambivalents à plein d'égards, le scénario est sûrement l'un des plus complexes que l'on puisse faire tout en s'adressant à des enfants.
(Bon les phrases précédentes contiennent un peu de cruauté envers La Belle et la Bête qui sort du lot parmi les Disney. Mais quand même)

Au niveau de l'animation, c'est bluffant, passées les premières scènes. Les textures de glace et de neige sont superbes et hyper-réalistes. On est sur la plupart des scènes à un niveau d'animation que j'attendais que chez Pixar (Après eux et Blue Light, un troisième studio qui met des baffes à Dreamworks, c'est parti).
Seul bémol, sur les figurants, notamment lors du couronnement, lesdits personnages secondaires ont été créés en quatre minutes montre en main. Toutes les mêmes robes sans texture, seule la couleur change. Mais bon, faut jeter un œil attentif sur ce qui se passe au second plan quand les princesses dialoguent pour repérer ça, et la qualité graphique du reste du film compense.

D'ailleurs petit aparté, il m'a semblé reconnaître lors de la scène d'intro un détail assez caractéristique de Dreamworks, y'aurait un de leurs concept-artists qui serait passé chez Disney récemment que ça m'étonnerait qu'à moitié.

Autre point soulevé dans la plupart des critiques, les chansons habituelles de chez Disney. J'les ai plutôt appréciées (Alors que les chansons Disney et moi c'est l'entente cordiale depuis des années), elles sont assez catchy, mais je concède que certaines sont mal passées à la traduction en français. C'est d'ailleurs pourquoi j'attends de le revoir en VO avant d'accorder le 10 à ce film.

Bref. J'suis sûr j'ai oublié la moitié des trucs que je voulais dire.

Meilleure surprise de 2013.


EDIT : Petit point sur pourquoi j'ai aimé ce scénario. Gaffe aux SPOILERS

Notons bien, je crie pas au génie non plus, ça reste un film pour enfants et ça reste en-dessous des Pixar, mais c'est bien bien au-dessus de ce qu'on a depuis 60 ans chez Disney et c'est fort appréciable.
Là où est, je trouve, la force du scénario, c'est dans la dualité de ses personnages.

La princesse Elsa, en premier lieu. Moi qui suis pas empathique pour un sou, j'ai très bien ressenti cette culpabilité qu'elle avait envers sa sœur. D'abord à passer dix ans en la laissant seule dans un château tristement clos, puis celle de gâcher le potentiel plus beau jour de sa vie en étant forcée, bon sens et responsabilité de souverain oblige, de lui refuser d'épouser le prince Hans. Trop de pression, trop de culpabilité, elle pète un câble, et vue l'apparition tardive d'un antagoniste, j'ai envisagé que, après la visite d'Anna au milieu de son isolement, elle passe définitivement du côté obscur de la force et devienne l'antagoniste. Et c'était pas absurde vu comment elle était borderline au point de blesser à nouveau sa sœur. Ç'aurait été fort, mais chaud pour un happy ending.

Le prince Hans, qui débarque de nulle part et nous rejoue le Rêve bleu avec Anna, dans n'importe quelle autre production Disney c'est inenvisageable que les deux fassent pas un happy end ensemble, jusqu'au dernier moment Anna est convaincue que c'est l'amour de sa vie parce que jusqu'ici 100% des princes qui débarquent de nulle part sont des bogoss et ils vécurent heureux toussa, et pourtant, twist, le mec est juste un foutu enculé. T'as 10 ans et t'as bouffé que des jolies histoires de princesse, tu te prends le mindblowing de ta vie devant celle-ci.

Pendant ce temps-là, le véritable prince charmant est bouffi, se ramasse dans la neige la moitié du temps et parle à des cailloux, prends-toi ça dans les dents le stéréotype du joli prince sourire ultra-bright. Jusqu'au bout, et moi aussi j'en étais persuadé, la "preuve d'amour" machin pour rompre le sort, on pense que c'est le moment niais quand elle va embrasser Kristoff, et non, c'est son sacrifice pour sa sœur qui lui a pourtant pourri son enfance.
Derrière ça, au lieu d'un "Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants", les deux rigolent et s'embrassent gentiment comme le couple d'adolescents qu'ils sont.
Et j'veux dire, un Disney dont la morale c'est "stop épouser les gens 10 minutes après les avoir rencontrés", c'est une sacrée preuve de prise de recul sur leurs anciennes productions.

Alors non, je refuse qu'on crie à l'histoire de princesse niaiseuse :<