Un jour sans fin

Auréolé de plusieurs récompenses récoltées dans divers festivals de l'animation, Toki wo Kakeru Shōjo était le seul film de Mamoru Hosoda que je n'avais pas visionné. Quand on jette un oeil à sa filmographie, on sent que ça a été un virage important dans sa carrière, lui qui se cantonnait à des adaptions d'oeuvres populaires comme One Piece ou Digimon. Rien de bien personnel en somme.

Cette traversée dans le temps part d'un script classique dans un cadre de lycéens, pas de quoi s'extasier jusque là. Toutefois, l'histoire qui est développée va se révéler plutôt passionnante en se centrant sur les préoccupations d'une jeune fille dénommée Makoto et très volontaire dans tout ce qu'elle entreprend. Elle qui n'est pas du genre à faire attention à ce qui peut lui arriver, tout peut lui tomber sur la tête, ça lui est égal et elle se contente de vivre au jour le jour. Assez garçon manqué sur les bords, elle utilise son temps libre à s'entraîner au baseball avec ses deux amis, Kousuke et Chiaki. Je n'en dirais pas plus pour ne pas vous spoiler.

Le thème abordé, le voyage temporel, suit un cheminement qui démarre de façon élémentaire à travers son héroïne pour s'élever vers quelque chose de plus concret, de plus sérieux. Au début, Makoto s'amuse de ce qui lui arrive, elle agit comme n'importe quelle adolescente ignorante le ferait. Mais de fil en aiguille, elle va sentir le poids de ses choix sur ses épaules. Le sens de la responsabilité va lui monter au cerveau et lui ouvrir les yeux sur certaines choses de la vie. De nombreuses situations permettent d'éclaircir cette capacité étrange qu'elle détient, cependant, au-delà de ça, il serait dommage de se désintéresser des relations entretenues par la galerie de protagonistes. Ils sont touchants, compréhensibles et ne tombent pas dans la niaiserie de bas étage. Des petites péripéties d’adolescents, tantôt amusantes, tantôt bouleversantes, parfois les deux à la fois et dans lesquelles n'importe quel être humain peut se reconnaître, puisque qu'elles évoquent des valeurs universelles.

D'un point de vue graphique, le chara-design n'est pas fameux, ce n'est pas ce qui importe, puisque la gestuelle et les mimiques des personnages sont suffisamment expressives. On les différencie très facilement, et ceux-ci s'imprègnent parfaitement dans des décors qui s'alternent et qui profitent d'un soin apporté au second plan. Quelques plans fixes sont de toute beauté, autrement, un ou deux passages en particulier ont retenu mon attention, dotés d'une puissance affective forte et sans retenue. La bande-son quant à elle est efficace, elle sait se faire discrète quand c'est nécessaire, ses notes musicales ponctuent agréablement l'ensemble.

Une jolie fable qui traite de la jeunesse japonaise en conjuguant humour et légèreté avant de devenir davantage mélancolique. La trame est bien pensée, même si cette notion de "remonter dans le temps" n'apporte pas plus au genre dans cet anime que dans un autre. Il s'en sert avec justesse, il lui donne de multiples aspects en faisant passer les personnages par toutes les émotions (et les spectateurs avec, certainement), sans se laisser aller à de la science-fiction déchaînée et désordonnée. Le film joue de ses paradoxes temporels, une sorte de « jour sans fin » initiatique, malgré certaines longueurs forcément. Un divertissement très honnête.