La Vie est belle, film de 1998, réalisé par Roberto Benigni

Titre original: La Vita e bella (Film italien)

résumé: Arezzo, petite ville de Toscane, 1938. Guido est jeune, débrouillard, et plein de gaieté et d'humour. En arrivant à Arezzo, où il compte bien ouvrir sa propre librairie, et ce malgré les bâtons qui lui sont mis dans les roues par le régime fasciste de Mussolini du fait qu'il soit juif. Il tombe amoureux de Dora, une jeune institutrice, et la charmant par son côté enjoué, il finit par l'enlever lors de la soirée de fiançailles de la demoiselle avec un haut membre du partit fasciste. Cinq ans plus tards, on retrouve Guido, marié à Dora, et père d'un petit Giosue, fan de chars d'assauts. Mais un jour, Guido et Giosue sont emmené en camp de concentration, ainsi que Dora qui ne voulant pas être séparée de son mari et son fils, monte de son plein grès dans le train les emmenant vers une mort probable. Arrivé au camp, afin de protéger son fils en lui cachant la vérité sur les camps de concentration, Guido lui fait croire qu'il s'agit en fait d'un jeu, et en invente les règles au fur et à mesure que son fils lui pose des questions de plus en plus gênantes. D'après lui, le premier prix de ce jeu serait un authentique tank.

casting
Roberto Benigni: Guido
Giorgio Cantarini: Giosué
Nicoletta Braschi: Dora
Horst Buchholz: Dr Lessing
Pietro De Silva: Bartolomeo
Giustino Durano: L'Oncle de Guido

critique:
Sélectionné à Cannes en 1998, c'est tout naturellement que ce film a décroché le Grand Prix du Jury, provoquant une réaction de joie des plus folle chez Roberto Benigni, qui alla même jusqu'à embrasser les pieds de Martin Scorsese qui lui remettait son trophée. Mais il est pourtant bien normal pour un film tel que celui là d'être repartit avec un prix du palais des festivals.

Car ce film a tous les attraits pour plaire au plus grand nombre, à commencer par une douce poésie autant dans les images que dans la musique, ou que dans les dialogues. Chaque seconde, chaque moment du film est un pur émerveillement, presque un enchantement, qui bien loin de faire oublier au spectateur le sujet premier de cette oeuvre (le génocide des juifs par les nazis et l'univers concentrationnaire), sublime cette atroce réalité, et la fait ressortir, la dénonce encore mieux que le plus terrible des documentaires.

Le film commence quelques années avant que Guido et sa famille soient envoyé en camp de la mort, et toute la première partie du film, tournée en Toscane, dans le superbe plaine d'Arezzo, dépeint de manière plus ou moins réaliste, et très humoristique, l'installation de l'idéologie fasciste en Italie. On y voit donc Guido draguer une belle italienne, sa "princesse", et la ravir grâce à une technique de drague imparable à un des dirigeant du partit fasciste. Cette partie sert en quelque sorte d'introduction, énonce quelques éléments de la doctrine nazie, et annonce la suite inévitable du film: Guido finira par être enlevé avec son fils et son oncle pour être déporté en camp de concentration, et sa femme, par amour, l'y suivra. Et la vision qui nous est donnée ici des camps, si elle peut paraitre un peu édulcorée, ne l'est en fait pas du tout. En effet ici, vous ne verrez pas de corps squelettiques (ou si peu), ni de mise à mort publique (ou du moins pas de manière directe), ni d'expérimentation sauvage sur des corps déjà affaiblis mais encore vivants. Non, ici, tout est suggéré, laissé à la libre imagination du spectateur, et c'est ce qui rend ce film si poignant, si tragique, si terrible. Terrible du fait de la réalité historique du sujet traité, ce génocide a bel et bien eu lieu, et d'autres génocides se perpétuent encore de nos jours (ya qu'à voir ce qui se passe en ce moment même au Darfour). Tragique car connaissant déjà à peu près les conditions de vie des gens dans les camps de concentration, le spectateur n'est donc pas dupe, et est bien conscient du fait que la probabilité pour Guido et Giosué d'en réchapper est vraiment des plus minime, voire même inexistante. Poignant cependant car même en sachant ça, ou plutôt malgrès le fait qu'on le sache, on ne peut s'empêcher d'espérer, devant l'amour que ce père porte à son fils et devant toute l'énergie qu'il utilise pour l'empêcher de se démoraliser, que toute la famille survive. Le spectateur voit donc se livrer en lui en quelque sorte un genre de bataille entre son esprit rationnel, qui sait d'avance la fin du film (l'un des membres de la famille au moins va mourir dans ce camp de concentration), et un esprit plus émotif, qui le fait espérer de tout son être une fin plus heureuse. Ce deuxième "état d'âme" représentant donc la pensée du monde vis à vis des atrocités ayant été commises durant les génocides, et durant le génocide juif en particulier: de telles atrocités sont impensables, à la limite du croyable, et même en sachant pertinemment que c'est pourtant la vérité, une partie en nous espère encore que ce ne soit qu'un mauvais rêve.

Cette opposition est d'ailleurs reprise dans l'une des scènes les plus tragiques du film, lorsque Giosué dit à son père qu'il a du mal à croire à son jeu, après qu'un vieil homme lui ait décrit tout un tas d'atrocités que les gardes du camp feraient subir aux gens incarcérés. C'est dans cette scène d'à peine quelques minutes, que toute l'atrocité de la guerre et de l'univers concentrationnaire est résumée. Giosué redit à son père tout ce que le vieil homme lui a dit, et son père, par amour pour lui et tout en sachant que les dires de son fils sont vrais, nie le tout lui racontant que le vieil homme a voulu le décourager pour lui faire abandonner le jeu. A ce moment là, Guido représente la population mondiale d'après-guerre, qui devant les témoignages convergeant de tous les rescapés de ces camps de la mort niera tout d'un bloc.

Vous l'aurez sûrement compris, "La Vie est belle" est un film jouant énormément sur le pathos et la sensibilité du spectateur. Cependant, cela n'est pas pour nuire au film qui au contraire y gagne en efficacité et en profondeur. Cette comédie, car cela reste le genre principal de ce film, ne brille pas par sa mise en scène des plus académique, mais bel et bien par le comique et l'énergie des acteurs principaux, qui même dans les moments les plus critiques savent nous faire rire (si on en est encore capable) ou au minimum sourire. Qui d'autre que le gaie et rieur Roberto Benigni aurait pu si bien parler de la période la plus noire du XXIème siècle sur le ton de la rigolade? La réponse est simple: personne, du moins à ma connaissance. Et pourtant, sur le ton comique, Roberto Benigni nous parle des camps de concentration de manière frappante, touchant le spectateur droit au coeur, et si beaucoup d'aspects du film sont loin de la réalité, ce n'est que pour insister encore plus sur l'inhumanité dont ont fait preuve les nazis.

Si ce film est à classer dans les comédies, il n'en reste pas moins à mon sens l'un des films le mieux réussis sur le sujet, à la fois terrible et humoristique. Terriblement humoristique. Ce film n'a pas reçut d'interdiction à une classe d'âge, mais reste cependant un film jouant énormément sur la sensibilité du spectateur. Pas de scène choc, ce n'est pas le but du film. Mais des scènes fortes en émotions, dont le simple souvenir, la simple évocation, pourront vous faire monter les larmes aux yeux, de joie ou de peines, parfois les deux mêlés, mais ne vous laissera jamais indifférent.

critique écrite par Tagazok

ma note: 17/20
filmsenvrac
8
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le 23 déc. 2014

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