La guerre est à nouveau déclarée

Que reste-t-il de l'univers trop naïf et hors-sol de Valérie Donzelli, dans son dernier film L'amour et les forêts ? Il reste le nom des personnages (Blanche et Rose Renard, Grégoire Lamoureux), un montage assez coloré, saccadé et poétique, le jeu assez ludique des jumelles Renard, toutes les deux incarnées par Virginie Efira (et sa doublure dos), et l'escapade sensuelle en forêt.
Dernièrement, le génie comique Edgar Wright a mis entre parenthèsese la comédie pour Last night in Soho, film horrifique sur le harcèlement sexuel... La tendance du cinéma contemporain, qui suit l'état d'esprit global de la société, sombre dans le macabre et le tragique. Autant dire, l'inverse de ce que nous a proposé Valérie Donzelli jusqu'ici (même La guerre est déclarée, au sujet lourd, avait un ton léger assez burlesque). Cette fois-ci, la guerre est celle de Blanche contre Grégoire. La guerre contre un homme toxique remarquablement incarné par Melvil Poupaud. La guerre intérieure d'une femme qui se fait violence pour résister, magnifiquement rendu par Virginie Efira, d'où sans doute la métaphore jumelle, comme un besoin de se dédoubler pour parvenir à s'extraire de son regard amoureux et naïf, et prendre du recul sur son mari dangereux... et sur le monde, cruel. Ici la confiance vient des femmes.
L'esthétique du film, par ses couleurs, cherche à créer quelque chose d'oppressant. Le foyer rouge, à la fois sensuel et fatal, contre le vert forestier, couleur de la liberté, même si l'alternative rencontrée en forêt n'a pas l'air plus charmante que l'oppression subie du foyer... On retrouve le style de Donzelli dans cette forêt, et sur la plage ensuite. Tout ce qu'il reste de Donzelli, c'est la nature, les forêts, sans l'amour.