LaRoy
6.7
LaRoy

Film de Shane Atkinson (2023)

Pour son premier long-métrage, Shane Atkinson choisit, comme principale source d'influence bien évidente, le cinéma des frères Coen et, en particulier, Fargo. Même choix du nom d'une ville comme titre (même si, dans le cas précis, de notre film, c'est une désignation fictive !), même type de personnages hauts-en-couleurs, avec, dans le lot, énormément de losers dans toute leur absence de splendeur, même alignement d'un nombre conséquent de cadavres à partir d'une situation banale, même plongée dans l'Amérique la plus profonde (en moins neigeux !), même ambition de mêler le thriller le plus impitoyable avec de véritables éclairs d'humour noir, touchant quelquefois à l'absurdité, y compris au sein d'une même séquence. À tout cela, on peut une distribution avec des figures atypiques et mémorables.


À propos de ces dernières, elles sont tout à fait dignes de figurer dans un Coen de la période du sommet, par leur talent, par leur présence, par leur charisme. On ne peut pas retirer à Atkinson d'avoir su parfaitement choisir ses comédiens et de leur donner la possibilité de sortir le meilleur d'eux-mêmes. John Magaro (que j'avais déjà croisé à plusieurs reprises, notamment dans Past Lives ou chez Kelly Reichardt !), Steve Zahn, Megan Stevenson, Dylan Baker, Matthew Del Negro, Galadriel Stineman... les noms de ces artistes méritent d'être cités du fait de leur excellence.


Autrement, le rythme est suffisamment soutenu pour ne pas ressentir une seule seconde d'ennui, bien aidé par une intrigue qui se relance sans cesse à coups de twist plus ou moins imprévisibles. La mise en scène étonne en paraissant mélanger plusieurs époques (la majorité des véhicules datent des années 1980 -clin d'œil peut-être à No Country for Old Men-, mais il y a des accessoires bien plus contemporains qui sont visibles !). La plupart des personnages sont bien caractérisés, parvenant autant à déclencher l'attachement que le mépris, à l'instar du protagoniste à qui on souhaite que le moins mauvais arrive, tout en ayant des démangeaisons aux jambes, car on a sérieusement envie de lui foutre des coups de pied dans le derrière pour qu'il se rachète de toute urgence une dignité.


Autant dire que c'est un début encourageant, en espérant que le cinéaste finisse par trouver un style qui lui est pleinement propre, en s'éloignant un peu plus de ses prestigieux modèles.


Il y a quand même pour moi deux grands défauts qui gâchent un peu l'ensemble.


Le premier, c'est que durant une partie conséquente du début du dernier tiers, le personnage efficace du tueur à gages, instaurant une atmosphère de menace bien comme il le faut (et cela dès l'introduction !), est pratiquement occulté. Ce qui est regrettable, car la tension s'amenuise en son absence, alors que sa présence tout du long était justifiée, étant donné qu'il est le principal danger pour l'existence des principaux caractères.


Le second concerne l'évolution des rapports entre notre loser en chef et le détective (bien ridicule, comme il le faut, dans ses habits de cowboy !), qui veut absolument l'aider. Dans toutes leurs scènes, ils ne font que s'opposer, sans que l'on sente une quelconque amitié, une quelconque estime venant du loser en chef se former à l'égard du "cowboy".


Ce qui fait que la fin semble sortir de nulle part.


Attention, ces soucis scénaristiques ne rendent en rien LaRoy déshonorant. Je reprécise que les débuts du réalisateur dans le long-métrage sont encourageants. En effet, il y a suffisamment de belles qualités pour que Shane Atkinson soit un nom à surveiller de près (et s'il pouvait remployer, à l'avenir, certains des comédiens du film, ce serait cool !).

Plume231
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le 20 avr. 2024

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