Last Days
6.1
Last Days

Film de Gus Van Sant (2005)

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Elles étaient derrière moi pour certains cours au lycée et se payaient ma tête de victime idéale autant qu’elles le pouvaient. Autant dire que mon ignorance absolue de Nirvana et de l’album Nevermind à l’époque de sa sortie, n’ont fait que renforcer leur idée que j’étais un tocard puisqu’ elles étaient fans absolues du groupe. Pour moi, Nirvana n’était qu’un gamin qui beuglait dans un micro avec des cheveux passés à la graisse automobile, bref je n’aimais pas Smells Like Teen Spirits (que je trouve toujours la plus mauvaise de l’album). Depuis les temps ont changé et Nirvana s’est révélé à moi et Nevermind est bien un grand album, que ne l’ai-je découvert avant.

Le film de Gus Van Sant constitue alors presque un pèlerinage, car voir un réalisateur de ce calibre, avec un cinéma si original et si personnel, s’attaquer à un sujet si ambitieux et polémique que la chute vers la mort de Kurt Cobain, ne pouvait qu’attiser les passions. Cette vision est toutefois personnelle au réalisateur, puisqu’il s’agit d’une libre inspiration plus que de l’histoire bête et disciplinée des faits. Restent cependant deux faits authentiques qui, pour l’un d’eux, révèlent une part des derniers jours de Kurt Cobain. Son corps a bien été découvert par un jardinier par un beau matin et Kurt est bien décédé quelques jours après s’être échappé d’une cure de désintoxication, d’où l’état comateux dans lequel il restera plongé jusqu’à la fin.

Gus Van Sant achève superbement sa trilogie sur une jeunesse en errance et en état de mort imminente, une jeunesse filmée par un regard protecteur, une jeunesse victime de l’égoïsme d’une génération d’ainés qui l’ont sacrifiée à leur profit. Alors Van Sant prend son temps, peut-être encore plus qu’à l’accoutumée, alternant les longs plans séquences faits d’éléments de mise en scène d’une précision picturale redoutable, avec de lents et longs mouvements de caméra tels ce superbe zoom arrière depuis la maison lorsque derrière les vitres Kurt tente de retrouver son talent musical. Van Sant touche la grâce lorsque, vers la fin, Kurt se met à chanter seul, incroyablement seul et transmet une infinie mélancolie qui touche très loin et bien plus que le jeune hurleur de Smells Like Teen Spirits.

Le portrait est finalement celui d’un chanteur au bout, physiquement et moralement détruit par sa carrière, son entourage et ses addictions. Un homme dévoré par un talent qu’on a voulu commercialiser et qui a fait de lui un produit, il semble errer comme un fantôme épuisé, amaigris et méfiant de tous ceux qui l’entourent. Il n’y a guère qu’en pleine nature, cette fois amie, qu’il semble trouver une sorte de repos et de lucidité. Cinéaste pas si exigeant, Gant Van Sant se trouve être un parfait analyste cinématographique qui n’oublie jamais que le principal moteur du cinéphile est le plaisir qu’il prend face à un film, quel que soit ce plaisir.
Jambalaya
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le 7 avr. 2014

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