Le cinéma suit un peu la même règle qu'un film d'horreur : pour espérer s'en tirer, il vaut mieux sortir au bon moment. C'est pour cela qu'un film du genre a toujours de bonnes chances s'il le cale au moment d'Halloween. En plus, être dans le giron Netflix assure une bonne visibilité (220 millions d'abonnés). L'équation n'est pourtant pas évidente : faire peur sans fermer la porte aux plus jeunes. Chair de Poule s'est bien fait une réputation sur le plan littéraire avant de passer par la case cinéma. Oui mais derrière la caméra, on trouvait Rob Letterman (rompu aux films d'animations), ce qui garantissait une certaine tenue. La tâche incombe ici à rien moins que Jeff Wadlow, véritable pionnier dans les œuvres...autres.


"La vraisemblance pour la vraisemblance est une perte de temps" disait Alfred Hitchcock. Une leçon poussée à l'extrême par Wadlow. Au cours de ces dernières années, le réalisateur est devenu virtuose dans l'art d'écarter toute cohérence à ses intrigues et de décerveler tous ses personnages après quelques minutes. Au lieu d'éclaircir l'ensemble, chaque séquence ajoute son lot d'énormités, d'illogisme et de twists couillons . Expérience traumatique pour l'innocent spectateur, orgasme historique chez les cinéphiles pervers. Bref, des souvenirs impérissables pour tous. Il tente le film d'horreur ? Vous ne frémirez pas une seule seconde. Pire, vous en rirez. Sérieusement ? Essayez Action ou Vérité ou Nightmare Island pour voir... En grand fan du lascar, je craignais que l'attelage Netflix + comédie familiale ne viennent s'interposer pour empêcher Jeff Wadlow d'établir une nouvelle performance...autre.


Erreur de débutant.


Ne jamais sous-estimer un artiste de ce calibre.


L'affiche est belle : La Nuit au musée version The Monster Squad. Zombies, insectes géants, squelettes vivants, lycanthropes, clowns psychopathes lâchés dans un petit patelin le soir d'Halloween. En vérité, l'algorithme Netflix a plutôt programmé un Ghostbusters Vs Stranger Things. Ça ratisse large, des plus âgés aux millenials sans oublier les tout petits. Comment contenter tout ce beau monde ? On s'en moque. Je ne plaisante pas, c'est réellement le mot d'ordre. Les frissons ? Ah Ah Ah ! Les gags ? Sauve qui peut. Le reste ? Par où commencer... Sans gâcher la découverte (regardez-le, s'il vous plait), je vous recommande grandement de ne rien attendre de l'intrigue, des interprètes, des rebondissements ou plutôt des facilités (un smartphone, ça fait de vous un sacré limier).


Comme les précédents films du génie Wadlow, Le Mauvais Esprit d'Halloween ne tient aucune des promesses de son pitch. Aucune. On ne croit pas plus à cette relation père/fille dysfonctionnelle qu'à cette famille tout court. Le nombre de transitions avec ruptures de ton est hallucinant. Mais pire, vous n'aurez même pas droit à une belle échauffourée entre les habitants et leurs colocataires maléfiques. Non, non, ils sont trop occupés à poursuivre nos héros à travers la ville pour que les autres pourtant en pleines festivités s'en aperçoivent. Le couplet science/paranormal serait d'une lourdeur effroyable s'il ne procurait le sacerdoce de Wadlow "Tout n'a pas à avoir de sens". Au point même de s'acharner à ridiculiser un personnage végan juste parce que...bah parce que. Sacré Jeff ! Achevons le tableau avec un Marlon Wayans parti tellement loin dans le surjeu que baisser les yeux est la seule chose à faire pour s'éviter une douloureuse cataracte.


Wadlow n'arrive pas cependant pas à irradier l'esprit avec autant de dévouement que ses précédents longs (il n'est pas crédité au script cette fois, zut alors). Comme quoi, le changement de genre a dû légèrement influer sur son travail (re-zut alors). Légèrement, soyez rassurés. Le long-métrage contient bien assez d'éléments attestant de sa filiation avec le metteur en scène. En plus, c'est expédié à troisième vitesse (1h25 sans générique) par conséquent rapide à avaler. Pour ce qui est de le digérer, par contre... Croisons les doigts pour que le succès soit au rendez-vous. Après David Fincher, Martin Scorsese ou Alfonso Cuarón, Netflix démontre qu'elle aime les auteurs toute catégorie en ajoutant Jeff Wadlow à leur tableau de chasse. Soit un galérien en passe de réussir là où tant ont échoué : faire d'un morceau de chiasse une curiosité artistique.

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le 18 oct. 2022

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