Le Roi des singes
7.2
Le Roi des singes

Long-métrage d'animation de Wan Laiming (1965)

Comment le Roi des Singes renversa les despotes Célestes pour devenir le Héros du peuple

Le Roi des Singes est effectivement un des piliers de l'animation chinoise (pour le peu qu'on en connaisse) et il faut avouer que c'est beau, c'est entraînant, c'est un symbole.


Si c'est vrai que la fin diffère un peu du conte traditionnelle La Pérégrination vers l'Ouest ou d'autres adaptations que j'ai vu (dans American Born Chinese, il y a une version où le Roi des singes Sun Wu Kong va jusqu'aux 5 piliers des confins de l'univers, sauf que c'est la main du Créateur céleste qui le punit de ses dangereuses pitreries en l'enterrant sous une montagne), le film reste très marquant.


Dans d'autres versions que j'ai vu, ce Singe manquait de respect et se moquait sans raison des autres dieux. Ici, c'est plutôt une sorte d'Hercule de Walt Disney, en plus pitre et plus surpuissant à un point que ça en effraye le Ciel.


Mais dans cette version, ce sont les Dieux chinois qui le traitent en menace et en être inférieur. Sachant que le film a été produit en 1961-1964, à l'époque où la Chine est communiste et athéiste, il est évident que le Roi des singes serait au contraire présenté comme le héros au-dessus des siens, mais aimant son peuple et refusant de faire les basses besognes de dieux prétentieux et hautains, au point de se révolter pour détruire un Ordre céleste indigne d'adoration.


Et même en sachant ça, le film dépasse cette potentielle propagande et s'avère être une superbe histoire d'un Héros certes né surpuissant, mais qui se bat pour son peuple et pour être reconnu comme l'Égal du Ciel face à une Cour céleste qui s'est rendu indigne de par son mépris de tout ce qui n'est pas comme lui.


Car même s'il représente une conception chinoise des choses, il représente aussi l'héroïsme idéal bravant les épreuves et la douleur. On pourra reprocher cependant au film les "réactions excessives" du Roi des singes, qui ne détruit la Cour céleste que parce qu'ils ne l'ont "pas invité". Sauf que les dieux sont pires : ils envoient des légionnaires et princes célestes pour exterminer les singes pour des broutilles (la tenue des écuries ou des jardins célestes, que le Roi des singes fait différemment de d'habitude).


D'ailleurs, les scènes de combat sont longues et dynamiques, le parfait mélange entre le film d'action et le cartoon. Sans compter cet affrontement étendu entre Sun Wu Kong et le Prince de Jade aux trois yeux. Même les petits singes (qu'on pourrait assimiler à la vision que le pouvoir soviétique se faisait du peuple) s'avèrent plus forts que les Légions célestes à eux seuls.


J'ai aussi aimé la façon dont le film présentait la mythologie chinoise tout en la démystifiant :


Il y a une scène où le Roi des Singes découvre le laboratoire secret de Lao Tseu (ici représenté en dieu de l'alchimie selon la tradition taoïste), ainsi que les pilules d'immortalité que les dieux mangeaient. Ce qui signifie qu'ils ne sont pas nés divins ou qu'ils ne sont pas supérieurs aux Hommes et aux Singes. La scène est à la fois intrigante et magnifique.


Déjà Égal des Dieux dès la naissance, le Roi des Singes effraie la Cour céleste et la défie, devient toujours plus fort pour combattre la torture et l'adversité, surpasse les dieux jaloux et les chasse du trône divin pour ensuite revenir aux côtés des siens et devenir le plus grands des Héros.


Quand on sait que Sun Wu Kong signifie "conscient de la vacuité", cela fait de cette version du Roi des Singes un être conscient que des dieux méprisant leurs semblables et leurs sujets ne sont pas dignes de sièger tout là-haut.


Bien que ce Sun Wu Kong était censé représenter Mao Tse Tong, il a quand même été censuré par le gouvernement chinois (en même temps, personne n'aime être assimilé à un singe - tout comme Xi Jinping n'aime pas être comparé à Winnie l'Ourson). Mais comme Mao Tse Tong a tué des millions d'opposants politiques, il n'était de toute façon pas digne d'être le nouveau Sun Wu Kong.


Grâce aux éditions spéciales françaises et la V.F. excellentes, nous retrouvons un trésor caché de la Chine méritant le visionnage, ce en raison de cette superbe interprétation de la Pérégrination vers l'Ouest et de son grand héros.

darevenin
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le 29 sept. 2018

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