Laid Royaume de la Pisse

Une salle de cinéma sombre, un très grand écran, des sièges douillets dans lesquels se lover. Une croisière cinéphilique d'environ 2h, mais pourtant quelque chose me manquait. Je n'étais pas convaincu de ce que j'allais voir, j'étais un peu sceptique. Mais j'y étais, il fallait donc la vivre.

Enfin, elle débuta, étrange, comme une tempête de bizarrerie qui grondait et menaçait, faisant trembler tout mon être, par vagues de plus en plus monstrueuses. C'est alors que l'une d'entre elle me sécha avec une violence inouïe, et je fut embarqué dans une mer déchainée, mais sitôt tombé, plutôt que de subir la colère de l'océan, un étrange bâtiment émergea des flots, d'une forme arrondie et peuplé de créatures étranges. J'allais pouvoir m'y réfugier.

Malheureusement, peut-être était-ce dû à la violence du choc qui m'avait emporté quelques minutes plus tôt, je n'arrivais pas à interpréter ce que je voyais. Oh il y avait là mille coloris, il semblait y avoir des instantanés d'une créativité folle, des formes de couleurs telles qu'on les voit dans les vidéos diffusées sur les plus beaux écrans 4k en présentation à la Fnac. Cependant, j'étais plus proche de la crise d'épilepsie que de l'émerveillement, je n'avais jamais le temps de prendre la mesure de ce qui m'était donné à voir. Et toujours ce sentiment paradoxal. C'était beau, ça se voulait beau. Mais c'était laid.

Parmi les étranges créatures que je croisais, il en était une qui m'accompagna durant cette bizarrerie que je traversais. A forme humaine, pas très agréable, mais pour autant d'une aide appréciable devant les épreuves qui se présentaient. D'autres qui se contentaient de me dire "je suis mignon et rigolo". Puis, par instants, des visions commencèrent à m'étreindre, derrière ce bariolé de couleurs, un rêve étrange. J'étais encore en train de me noyer, une forme sombre planait sur moi, je suffoquais, abandonné. Des flash, qui me saisissaient par instants. Puis d'autres ou j'étais toujours en train de vivre cette aventure mal aimable. Nous étions régulièrement attaqués par un fantôme marron. Tout cela dura un moment. Bien trop long, jusqu'à ce qu'on atteigne le fond de l'océan. Et que mon désagréable compagnon me sauve la vie d'une ultime attaque du démon marron.

Ce n'est que plus tard que je compris, en ouvrant les yeux sur un lit d'hôpital. J'étais sorti du film en vomissant, me réfugiant dans les toilettes de mon cinéma. Là, pris d'un malaise, j'ai perdu connaissance, tombant la tête la première dans la cuvette à la chasse non tirée, la tête moulée par un colombin. A côté, le crackeu que je n'avais même pas vu, qui venait de s'infliger sa triste dose, et qui essayait en vain de me sortir de là, trop défoncé pour être efficace. Dans une ultime tentative, il extirpa ma tête, et l'effort pour lui fut de trop.

De part et d'autres du lit, ma mère, et mon père. En pleurs, me contant mon histoire.

En me remémorant ce Royaume des Abysses, je pense que je préfère encore avoir subi ce qui m'est arrivé. Et la leçon de mon histoire, c'est qu'une merde, quand bien même elle est masquée par d'innombrables paillettes et seaux de peintures, cela reste une merde.