- "Le Tombeau des lucioles" dans mon "TOP 10" -

Durant l'été 1945, Seita, un adolescent de quatorze ans et sa petite sœur de quatre ans, Setsuko, bien qu'heureux auprès de leurs parents, vivent une enfance tourmentée dans un Japon secoué par la Seconde guerre mondiale. Un jour le ciel s'assombrit brusquement lorsque l'aviation américaine déverse un flot de bombes incendiaires sur leur ville. Leur mère décède des suites de cette attaque et les enfants se retrouvent sans nouvelle de leur père, militaire de l'armée japonaise. C'est alors que devenus seuls et livrés à eux-mêmes ils vont essayer, sans succès, de le retrouver. Il vont loger chez une tante qui les exploite en les faisant travailler. Seita et sa petite sœur décident alors de partir à l'aventure pour essayer de survivre en se cachant dans une vieille masure magiquement illuminée la nuit par une nuée de lucioles. Le rêve ne dure pas car Seita, aux petits soins pour Setsuko, a de plus en plus de mal à trouver de la nourriture et les forces s'amenuisant la petite fille tombe gravement malade. Seita prêt à tout pour la sauver va alors être dans l'obligation de voler de la nourriture...


Lorsque l'on découvre ce fantastique dessin animé, on ne peut être pris que dans un tourbillon de violence, de méchanceté, de cruauté, de lâcheté mais aussi d'amour et de compassion. Bien sûr, durant cette Seconde guerre mondiale, le Japon ne passa pas pour le pays le plus pacifique. Toutefois lorsque l'on voit les bombardiers jeter de leurs flans leurs bombes incendiaires ravageant tout et de quel côté où l'on se place, on ne peut qu'être horrifié par cette barbarie tuant des innocents et décimant des familles. Devant de tels évènements le peuple devrait s'unir et être solidaire, tout au moins c'est ce que croient Seita et Setsuko. Au lieu de cela, terrorisés mais confiants dans la vie car remplis d'espoir pour un monde de liberté, ils vont se trouver trahis par leur famille et leurs congénères qui, malgré les évènements, restent repliés sur leur personne, faisant ressortir leur méchanceté et leur individualisme jusqu'à profiter du malheur et de la détresse des deux enfants.
Cela n'est pas qu'une fiction cinématographique, c'est malheureusement la réalité d'un monde rempli de lâcheté, d'opportunisme et manquant singulièrement de pitié et de solidarité envers les plus démunis. Ces deux enfants, touchants de sincérité, partaient à l'aventure à la suite du drame atroce qui les avait touchés, espérant un monde meilleur. Au lieu de cela, ils devront se battre seuls et apprendre que l'ennemi ne vient pas uniquement de l'armée adverse mais plus sournoisement de leur entourage. Nos deux mômes pourtant plein de rêves et d'espoir ne pourront survivre à cette société car dans ce monde qui s'agite devant eux, aucune place ne leur sera offerte. C'est pourquoi dans la grande ville japonaise, à l'automne 1945, on ramassera les corps sans vie des innocentes victimes avec la même légèreté que le balayage des feuilles mortes. Le monde est ainsi fait...


A nouveau, le grandissime Isao Takahata nous offre un film dans lequel l'émotion et le réalisme sont à leur comble. C'est dans ce quartier, remarquablement reproduit dans cette œuvre, qu'il connut lui-même l'enfer des bombardements et c'est certainement pour cela que chaque image apporte son lot d'émotions fortes. Comment ne pas être touchés par l'amour fou régnant entre ces deux enfants perdus et tâchant par tous les moyens de s'accrocher à un fil de vie, à un fil de rêve et d'espoir illustrés par ces milliers de lucioles qui tentent d'illuminer la nuit dans laquelle ils se noient petit à petit! Les enfants sont beaux, même dans la douleur et dans la peur. En fait ils sont le pur symbole de l'amour et de la fidélité tout au long de leur courte vie. Les images comme le scénario sont aussi forts que poétiques et les remarquables couleurs ne font que renforcer la cruelle beauté de ce chef d'œuvre.


Si je dois vous donner un conseil, je vous demanderais de ne rater sous aucun prétexte ce film qui au-delà de l'émotion qu'il suscite nous entraîne dans une intense réflexion sur le comportement de nos sociétés. En quelques mots, cet incontournable du dessin animé concocté par Isao Takahata est beau à en pleurer.


note: 10/10

Grard-Rocher
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top 10 Films, Les inoubliables., Cinéma : Entrez dans le monde du film d'animation. et Les films à la meilleure photographie

Créée

le 25 avr. 2014

Modifiée

le 1 mai 2013

Critique lue 9.8K fois

134 j'aime

56 commentaires

Critique lue 9.8K fois

134
56

D'autres avis sur Le Tombeau des lucioles

Le Tombeau des lucioles
Silence
10

Les vestiges de l'absurde [9.7]

Il est parfois bon de filmer le comportement individuel de fourmis avant de filmer l'interieur de la fourmillière, puisque le tout ne signifie que la somme des particules... Isao l'a bien compris et...

le 31 mai 2013

138 j'aime

8

Le Tombeau des lucioles
Grard-Rocher
10

- "Le Tombeau des lucioles" dans mon "TOP 10" -

Durant l'été 1945, Seita, un adolescent de quatorze ans et sa petite sœur de quatre ans, Setsuko, bien qu'heureux auprès de leurs parents, vivent une enfance tourmentée dans un Japon secoué par la...

134 j'aime

56

Le Tombeau des lucioles
Hypérion
9

L'Enfance. Ravagée.

Je pouvais difficilement revoir Mon Voisin Totoro sans enchaîner sur son contemporain Le Tombeau des lucioles, piliers du succès du studio Ghibli. Comme pour Mon voisin Totoro, je pourrais me...

le 9 déc. 2011

124 j'aime

9

Du même critique

Amadeus
Grard-Rocher
9

Critique de Amadeus par Gérard Rocher La Fête de l'Art

"Pardonne Mozart, pardonne à ton assassin!" C'est le cri de désespoir d'un vieil homme usé et rongé par le remords qui retentit, une triste nuit de novembre 1823 à Venise. Ce vieil homme est Antonio...

176 j'aime

68

Mulholland Drive
Grard-Rocher
9

Critique de Mulholland Drive par Gérard Rocher La Fête de l'Art

En pleine nuit sur la petite route de Mulholland Drive, située en surplomb de Los Angeles, un accident de la circulation se produit. La survivante, Rita, est une femme séduisante qui parvient à...

166 j'aime

35

Pierrot le Fou
Grard-Rocher
9

Critique de Pierrot le Fou par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Ferdinand Griffon est entré malgré lui dans le milieu bourgeois par son épouse avec laquelle il vit sans grand enthousiasme. Sa vie brusquement bascule lorsqu'il rencontre au cours d'une réception...

156 j'aime

47