Prenant ancrage dans un environnement résolument contemporain (la construction des lignes ferroviaires du train rapide Shinkansen, fleuron de l'industrie nippone), ce thriller narre par le détail les agissements d'un promoteur véreux maquillant l'achat de terrain à des fins spéculatives. Pris dans l'engrenage un entrepreneur local endetté découvre trop tard la manœuvre et tente de réclamer son du. Cette quête du gain débouche donc sur un complexe canevas impliquant dans sa progression une jeune secrétaire dont le rôle de maîtresse devient le pivot d'un récit s'articulant sur des mensonges et arrangements. Illustrant les ravages indirects d'un capitalisme gangrené, le Train Super-Express noir procède par enchaînements de longs tunnels narratifs expliquant avec force détails les tractations de l'entrepreneur floué, un homme naïf qui entraînera malgré lui la jeune femme dans des sphères dangereuses. S'appuyant sur un canevas très linéaire ne ménageant par de respirations psychologiques aux personnages, Masumura livre une critique peu subtile du pouvoir de l'argent et de ses implications dans les relations humaines. Ainsi la dimension sexuelle du personnage féminin, pourtant responsable du drame en cours, se trouve traité sous un angle unidimensionnel dépassionné. Un cheminement routinier renforcé par des dispositifs narratifs et formels cliniques (usage du Noir et Blanc, structure étouffante de huis-clos). Désabusé, l'épilogue appuie l'image d'un capitalisme pervers scindant la société en deux camps (les profiteurs et les victimes) laissant sur la route les exclus d'un miracle économique ne profitant qu'aux affairistes (voir le plan final d'un Shinkansen dépassant triomphalement un banal train de ligne. Un bilan résolument pessimiste qui culmine dans une escalade brutale (scène étirée de strangulation) où le héros n'a plus qu'a découvrir amer les conséquences indirectes de sa quête en reconnaissant le cadavre froid de la jeune femme échoué dans une lande industrielle.
Gewurztraminer
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le 30 mars 2011

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