La forêt des maraudes
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le 1 mars 2019
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Impossible tout d'abord de ne pas penser à Captain Fantastic devant ce film. Même parcours en festival (Cannes, puis Deauville) notamment, et thèmes abordés similaires : un père et sa fille en marge de la société, qui vivent "au vert", dans les grandes forêts américaines, leur véritable maison. Mais très vite, on s'aperçoit que le parti pris entre les deux films est finalement tout à fait opposé : là où Captain Fantastic mettait en avant une forme d'idéalisation de cette vie sauvage et forestière, Leave no Trace se place ici dans le concret : cette (sur)vie dans les parc naturels forestiers de l'Oregon et de l'état de Washington est la réaction pour le père d'un choc post traumatique. Trauma qui s'exprime par un besoin vital de se placer en dehors des rouages de la société moderne, et qui est également poussé par la nécessité et la pauvreté. Pas d'idéal, pas non plus de plénitude pour cette vie dans la nature, mais plutôt un besoin de fuite, d'échapper à cette société envahissante.
De cette vie, les moments de bonheur des deux protagonistes sont à rapprocher de ceux que vit Christopher dans Into the Wild : des moments de joie, où l'accent est mis sur la "liberté de pensée" (l'expression revient plusieurs fois dans le film), mais qui sont très vite rattrapés par la dure réalité de cette vie sauvage : le froid, la faim, la soif et les accidents sont autant d'épisodes qui ponctuent le film.
Côté réalisation, Debra Granik a su placer au centre du film l'environnement qui entoure ce père et sa fille. La forêt joue le rôle d'un protagoniste. L'image s’attarde sur les fougères, la mousse sur les arbres, et tous ces éléments qui rendent compte de la vie de la forêt. On apprécie notamment le travail sur l'humidité des plantes (il pleut plus de 315 jours par ans dans cette région du monde).
Enfin, les deux acteurs sont formidables. Ben Foster, que l'on avait vu il y a peu dans Comancheria, confirme son statut d'acteur définitivement à suivre (on le verra d'ici quelques jours dans Galveston, le nouveau film de Mélanie Laurent, au côté de la géniale Elle Fanning).
Thomasin McKenzie, la jeune fille de l'histoire, est magnétique et d'une justesse de jeu rare.
J'avais raté le film à la Quinzaine des Réalisateurs, et je ne serai pas forcément allé le voir la semaine prochaine en salles sans cette Cinexpérience #118 (encore une fois merci SC!), mais le film vaut vraiment le détour : à recommander chaudement !
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Créée
le 11 sept. 2018
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