Voilà un film mal fait, artisanalement parlant, mais passionnant : monté à l'arrache, truffé de zooms-dezooms dans tous les sens, de panoramiques sans queue ni tête. Mais, peu familier de l'œuvre de Benoit Jacquot, on ne sait s'il s'agit de maladresse ou d'une – pour le coup incompréhensible – volonté artistique.

A vrai dire, on s'en fout, car le film est très bon. Le pitch ; la jeune Sidonie Laborde (Léa Seydoux) , liseuse de Marie Antoinette, va vivre les événements d'un certain 14 juillet 1789. Ignorer ces événements, d'abord, dans cet îlot isolé qu'est Versailles (« à 15h de Paris« , nous précise-t-on), puis, au fur et à mesure que les événements atteignent le Château, vivre l'inquiétude, la panique, la trahison.

Le génie de Jacquot (et du livre, imagine-t-on), c'est à la fois de ne sombrer devant aucune complaisance vis-à-vis de cet jet-set du XVIIIème siècle, mais aussi de ne pas charger la barque.

Marie-Antoinette (Diane Kruger) sera ainsi capricieuse, courageuse, lucide, écervelée. Une vraie femme, un être humain, coincée comme tout un chacun dans le rôle qui lui a confié le destin. Sa liseuse, est à la fois admirative de sa maîtresse, affectueuse, mais aussi indépendante, futée, jouant de ses propres cartes contre la noblesse (l'épisode de la broderie). Car les valets, à Versailles, ne sont pas sans pouvoir.
Mais en même temps, Sidonie Laborde est une aveugle, tout aussi en retard sur les événements que sa maîtresse.

La force du film est de montrer ainsi que chacun a ses choix, qu'il n'y a pas de fatalité, et qu'il n'y a pas de pauvres valets et de méchants exploiteurs. Léa Seydoux fait, pour la première fois me semble-t-il, la preuve d'un immense talent, Diane Kruger est excellente, Noémie Lvovsky, est parfaite comme toujours, en duchesse versaillaise ou en mère d'ado des années 2000.

Mais c'est surtout ce parti-pris réaliste qui emporte le tout, cette visite décalée de Versailles côté coulisses. On passe des cuisines, où l'on magouille des sous, des avantages en nature, ou une aventure amoureuse, aux pièces luxueuse du palais, avec ses rites, ses obligations, ses manières.

Tout cela sera emporté, sans ménagement.
ludovico
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le 30 avr. 2012

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