Une réussite... malgré les invraisemblances !

Ainsi ce film brillant et palpitant, doté de ses qualités cinématographiques propres, est-il un catalogue d'invraisemblances dont les profanes n'auront évidemment cure mais dont chacun voudra bien comprendre qu'elles fassent quelque peu sursauter un auxiliaire de justice, nonobstant son plaisir non boudé de simple spectateur.
Un juge d'instruction qui laisse un avocat (qu'il soit celui de la partie civile ou de la défense) démolir un témoin lors d'un acte de l'information (ici, une reconstitution), au point de battre lui-même en retraite, c'est invraisemblable.
Un juge d'instruction qui laisse les avocats entrer dans son cabinet comme dans un moulin et les laisse pareillement lui dicter sa conduite de l’information, c'est invraisemblable.
Un juge d'instruction qui place une personne inculpée en détention provisoire pour ne pas être débarqué du dossier à la demande de l'avocat de la partie civile, c'est invraisemblable.
Un juge d'instruction qui demande en haut lieu à être dessaisi de sa mission parce qu'il ne se sent plus de taille à affronter les manœuvres d’un avocat, c'est invraisemblable.
Une cour d'assises qui entend la déposition spontanée de ce juge d'instruction dessaisi venu lui confier ses états d'âme, c'est invraisemblable.
Un avocat de la défense commis d'office dont c'est la première expérience aux "assiettes", démuni, désarmé, vulnérable comme une chair tendre de crustacé aux prises avec un vieux et coriace briscard du barreau qui va n'en faire qu'une bouchée à l'audience, c'est invraisemblable.
Une cour d'assises qui écarte la circonstance aggravante de préméditation au bénéfice de l'infirmière après qu'elle l'a déclarée coupable d'avoir volontairement donné la mort à son patient dont elle était la légataire universelle, c'est invraisemblable.
Et la fin du film, dont je ne dirai évidemment rien, est encore invraisemblable...
Voici qui fait beaucoup d'invraisemblances dans un film judiciaire mais qu'importe, bien sûr, puisque c'est de l'excellent cinéma, ce n'est pas moi qui dirai le contraire.
Du grand art, oui, grâce à toutes ses qualités fort bien vantées avant que je ne m'exprime.
Avec une troupe d'acteurs du plus haut niveau, hors l'époustouflant tandem Bourvil-Brasseur (Marina Vlady, Virna Lisi, etc.).
Mais un film qui, une fois encore, démontre que les règles de la justice et la loi du cinéma forment un couple fort improbable, ce qui n'empêche heureusement pas que, comme ici et ici mieux que jamais, son rejeton procédant d’un concours d’invraisemblances soit une réussite.

Chicago
7
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le 18 oct. 2016

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