Cela faisait plus de 20 ans que je n'avais revu ce film.
Ce qui frappe tout d'abord, c'est l'avance de Huston sur son temps et le changement radical dans son cinéma, plus précoce qu'on ne le pense souvent. Cassavettes a fait Faces en 59, ne fera Shadows qu'en 1968, mais Huston est vraiment là, dans le cinéma des 70's dès 1961, dans son rythme, son rapport aux corps, aux acteurs, au jeu. Et pourtant,à l'écran ce sont des stars des 40's; 50's qui jouent. Cela crée un drôle de décalage, une méprise par rapport à ce film, loin d'être parfait (oui, il y a des longueurs) mais totalement fascinant. Marilyn est extraordinaire, vraiment. Elle déborde de partout, accroche chaque particule de lumière, a un jeu d'une modernité rare qui annonce là aussi Gena Rowlands plus qu'elle n'évoque les stars hollywoodiennes. Gable lui aussi est génial, le voir caresser une poutre (!), ivre, en pleurant ses enfants, c'est du Brando deuxième période. Wallach est nickel. Seul Monty Clift déconne un peu, surjoue sans relief véritable.
Après, on peut regretter les longueurs (dues au scénar de Miller, je pense), mais là aussi, elle m'ont plus évoqué Monte Hellman ou Sarafian que le cinéma de papa. Huston pose ici les bases de ce que ce sera la prochaine apogée de son cinéma : Fat City, Le malin.
On a trop souvent présenté Les Misfits comme un film raté, la fin d'un âge d'or où les grandes stars s'abîment avant de mourir peu après. C'est exactement l'inverse, une des premières pierres (certes un peu bancale) d'un nouveau cinéma, posée avec la complicité de gigantesques acteurs alors au sommet de leurs talents.