"Les Douze salopards" est un film que j'affectionne tout particulièrement. Non seulement c'est bon, mais en plus, c'est un fichu classique de film de guerre. Mais vraiment. Lui, c'est pas le genre qui se ratatine devant les autres, non, il plastronne fermement au milieu de la concurrence, imposant ses délires et ses qualités au monde entier.


Dans mes souvenirs, il m'avait plu, mais sans plus; c'était, à mon sens, un solide film du genre, mais qui ne suscitait pas d'intérêt particulier pour que j'en fasse une critique. Bon, je vous le cache pas, je n'étais pas trop critique, à l'époque; je devais avoir quelque chose comme 13 ou 14 ans, alors bon...


Le tout étant que l'ayant revu récemment, j'ai désormais l'occasion de vous en parler plus en détail. Qu'en est-il donc de ce deuxième visionnage? Il m'a été véritablement salutaire. Non pas que la première fois, ça m'avait pas plu, mais autant vous dire qu'à mon âge d'antan, j'étais pas trop réceptif à l'art des années 60. Non, j'étais plutôt "Transformers", "Hulk", "The Marine" et toutes ces daubes que l'on sert aux amateurs de grand spectacle décérébré (exception faîte des John Cena, bien sûr). Décidément, heureusement qu'on change, dans la vie...


Enfin bref. Pour commencer en douceur, j'ai trouvé le travail d'écriture particulièrement soigné; c'est net, efficace, réfléchi, en gros, c'est tout ce que l'on demande. Le scénario étant original, c'est un plaisir que de suivre les aventures de cette bande de "salopards", détestables à la mesure même qu'on les adore. Et justement, cette affection qu'on leur porte est due, je pense, à trois facteurs.


Premièrement, le plus simple : le titre. "Les Douze Salopards" soulignant que nos héros seront des salopards, et qu'ils compteront au nombre d'une douzaine, nous amène à les apprécier de suite. On les attend de pied ferme, en fait, prêts à ne rien laisser passer si quelque chose ne va pas, si tel ou tel détail n'est guère satisfaisant, et c'est parce qu'il sont salauds qu'ils seront rendus attachants par le film, qui traite le crime avec dérision, comme pour montrer l'homme derrière la réputation.


Et s'ils sont entièrement attachants, c'est également, je pense, grâce à cette qualité d'écriture précédemment évoquée. Non seulement les mecs sont bien développés, avec des personnalités de serial killers attachantes (fallait le faire...), mais en plus, l'interprétation globale est tellement bien menée que tous se démarquent les uns des autres, formant une troupe aussi disparate qu'unie.


J'aime à penser qu'il existe une réelle alchimie entre eux; ils se complètent, se lèguent un certain pouvoir, ainsi qu'un charisme certain. Qu'auraient fait, par exemple, tous ces tarés, si le personnage de Telly Savalas avait été absent de l'intrigue? Honnêtement, pas grand chose. Et c'est justement cette interdépendance que tous possèdent qui les rend à ce point unique. C'est paradoxal, je sais, mais c'est ainsi que je ressens le film, et ses personnages.


Bon, forcément que le film est imparfait, qu'il a vieilli, et que son humour commence sérieusement à dater, mais son efficacité constante m'a souvent laissé pantois, et merde, c'est que je l'ai trouvé drôle, "this little bastard". La mise en scène relève également le tout, notamment lors des scènes d'action, d'un réalisme redoutable, symbole de la violence des films de guerre de l'époque, et de la pureté de l'action qui s'y déroulait; on est quand même loin des tirs et des explosions numériques du dernier "Expendables" (entre autre).


Ca y est, la critique arrive à son terme. Que faut-il donc retenir de ce "Dirty Dozen"? En bref, c'est un grand film, le genre qu'il faut avoir... Et puis merde, j'en ai marre de conclure sur des dires communes! "Que vous l'aimiez ou pas, de toute façon, il s'en fout", comme l'aurait si bien dit Ozzy. Peace.


Edit 15/10/2019 : Le revoir fut une vraie déception. Le film reste sympathique, mais les années ayant passé ont normalisé son histoire, et banalisé sa fin. Les Douze Salopards, s'il excelle de toute évidence pendant une heure et demie de séquences humoristiques décalées, à caractériser ses personnages de façon toujours plus folle ne peut s'empêcher de se ranger, en fin de course, du côté des films de guerre classiques en livrant au spectateur ce qu'il était venu chercher, sacrifice et morts à la pelle.
L'ultime bataille semble un brin forcée, et laisse en tête la terrible impression que Rob Aldrich était forcé de la faire; il est clair qu'il a surtout réalisé Dirty Dozen pour la longue introduction jouissive de ses personnalités complètement givrées, interprétées par des acteurs toujours aussi savoureux. Marvin, Cassavetes, Bronson, Sutherland, Borgnine, Brown et Savalas forment une équipe de choc devenue iconique dans le cinéma de genre, où chacun des acteurs trouvera son moment de gloire absolument hilarant (la revue des troupes de Sutherland, la séance chez le psy de Bronson), trouvant pour la plupart de fabuleux rôles à contre-emploi.
Toute une évolution de leur personnalité que l'on suit avec grand intérêt lors d'entraînements passionnants, toujours montrés avec maîtrise et intérêt : sur ce plan, le film fait preuve d'une efficacité inattendue, et s'avère l'être bien plus que ce qu'il pourra transmettre avec son combat final, certes long mais trop proche du listing de morts pour émouvoir un minimum (il va jusqu'à faire mourir des personnages hors-champs, en les citant seulement à la revue des troupes du générique de fin).
Ce côté listing déshumanise complètement un divertissement qui jusqu'ici jouissait de son talent à rendre humains monstres, à redonner leur dignité à de terribles parias. C'est comme si la fin forcée venait annuler tous les efforts de l'équipe en charge du projet pour se démarquer des autres oeuvres du genre, désireux à la base de rendre leur lettre de noblesse aux oubliés de notre société. Dommage qu'il n'aille pas jusqu'au bout de son propos, et tombe dans une hécatombe finale qui sent plus l'attendu que le renversant.
Il demeure cependant un grand film dont le visionnage reste, plusieurs reprises encore après la découverte initiale, un plaisir de chaque instant.

Créée

le 31 déc. 2015

Critique lue 524 fois

4 j'aime

FloBerne

Écrit par

Critique lue 524 fois

4

D'autres avis sur Les Douze Salopards

Les Douze Salopards
Dimitricycle
8

Rennes de la nuit

Qu'est-ce qui m'arrive en ce moment ? Quatre critiques en trois jours, c'est du jamais vu ! D'habitude je tourne à une tous les deux mois, max (dooouuucement, faut pas pousser). Est-ce une...

le 7 août 2013

30 j'aime

2

Les Douze Salopards
Sergent_Pepper
7

Nous sommes les saigneurs du château

Lorsque Robert Aldrich se frotte au film de guerre, c’est un peu comme lorsque Peckinpah fait de même : on a hâte de voir la manière dont il va épouser les codes du genres, et surtout la façon dont...

le 12 févr. 2018

28 j'aime

Les Douze Salopards
Marius
7

"America, fuck yeah"

1944. Juste avant le D-Day, l'état major a une brillante idée: et si on envoyait notre plus belle collection d'enfants de putains, des violeurs, des tueurs, des débiles, pour commettre un crime de...

le 15 sept. 2010

22 j'aime

Du même critique

Les 4 Fantastiques
FloBerne
2

Des fois c'est dur d'être un geek... Putain mais quelle purge !!

Dans le ptit bled paumé où je passe le clair de mes vacances s'est proposée une expérience pas commune : voir le film "Les 4 Fantastiques" en avant première. Nourri d'espoirs et d'ambitions, je me...

le 4 août 2015

35 j'aime

42

Marvel's The Punisher
FloBerne
8

Miracle et drama

Saison 1 : 9/10. Au cinéma, nombre de personnages se sont fait massacrés pendant des décennies, sans vergogne ou une once de progrès. Les comics aussi ont été touchés par cette mode de la destruction...

le 13 déc. 2017

34 j'aime

4