Les Grandes Familles par Maqroll
L’académisme dans toute son expression. Roman de Maurice Druon, adapté par « le Mauriac du pauvre » du cinéma et filmé avec un classicisme parfait. La distribution est elle aussi des plus académiques avec bon nombre de sociétaires de l’illustre Comédie française. Jean Desally, Annie Ducaux, Françoise Christophe, Pierre Brasseur, Bernard Blier, Louis Seigner, Jean Murat, Aimé Clariond, Jean Wahl, Jean Ozenne… bref, la fine fleur du cinéma français académique de cette fin de troisième république. Et puis, pour dominer tout ça, le grand, l’énorme Jean Gabin, qui a beaucoup vieilli depuis la fin de l’occupation, qui a cinquante-quatre ans et qui a l’air d’en avoir vingt de plus. Un Gabin de fer, issu d’une lignée de travailleurs, qui se moque bien de l’argent mais qui ne crache pas sur la puissance qu’il rapporte… Il élabore, pour donner une leçon à son nigaud de fils (Jean Desailly dans sa pleine époque « jeune premier ») une leçon qu’il n’oubliera pas de sitôt et qui vaudra également pour les quelques fripouilles qui se disent ses amis… Secondé par son fondé de pouvoir à la personnalité parfois surprenante (excellent Bernard Blier), la machination va se dérouler comme prévu… jusqu’à ce que la fatalité la rende dérisoire. C’est l’étude des grandes institutions : famille, travail, religion, argent… mais, comme toujours avec Druon, l’étude est pour le moins ambivalente car la critique recouvre une grande part d’admiration… Un film à voir pour sa valeur historique de cette époque charnière de l’histoire de France, une France qui s’apprêtait à passer à l’âge moderne avec l’accession au pouvoir de Charles de Gaulle… qui allait bientôt remettre en cause toutes ses institutions tout en les laissant prospérer.