Se faire passer pour une bande de faux chasseurs de fantômes n'est pas forcément le truc le plus futé à faire en Écosse au vu du nombre de vieilles bicoques louches et susceptibles d'abriter de vrais esprits à travers le pays... Mais ça, Angela, son frère Jackson et leurs amis l'ignorent encore et arrondissent leurs fins de mois difficiles d'étudiants en profitant de la crédulité de pauvres victimes encore endeuillées par la mort d'un proche. Pour apporter de la véracité à leur combine, ils utilisent le fait que la mère d'Angela et Jackson ait légèrement pété un câble à force d'entendre prétendument des voix de défunts pour faire de sa fille la figure médiumnique de leur petit groupe d'escrocs. Seulement, depuis quelques temps, Angela se met vraiment à avoir des visions, a-t-elle réellement hérité du don de sa mère ou, pire, de sa folie ? En plein doute, la jeune femme accepte de suivre son frère et ses amis pour une nouvelle "affaire" dans la vaste demeure d'une certaine Mrs Green où des fantômes de fillettes assassinées auraient une méchante dent contre les vivants...


Des arnaqueurs du surnaturel pris à leur propre jeu face à de vrais esprits maléfiques n'est pas un concept très innovant en matière d'épouvante mais "Malevolent", petit film sorti de nulle part en forme de melting-pot culturel (un projet américain filmé en Écosse par un réalisateur islandais au nom supra-tout-mignon d'Olaf de Fleur Johannesson) va tenter de se différencier avec une intrigue où les faux-semblants ne vont pas forcément venir de la direction la plus évidente.
Après une exposition assez anecdotique mais nécessaire pour présenter les problèmes et motivations du duo frère/soeur en vue de les amener sur leur nouvelle affaire, "Malevolent" nous emmène au coeur de sa maison hantée qui, par son seul décor et lourd passif, va suffire à installer une ambiance oppressante et un sentiment de peur finalement simple et direct où chaque recoin de la demeure paraît susceptible d'abriter la silhouette d'une fillette qui n'a rien à y faire. Le film n'évite certes pas le recours aux jumpscares faciles mais l'atmosphère de peur à l'ancienne recherchée par Olaf de Fleur joue incontestablement en sa faveur pour emporter notre adhésion et ce, même si ses apparitions surnaturelles dénuées d'artifices CGIesques ne font pas forcément toutes mouche.
Autre bon point, "Malevolent" fait évoluer ses enjeux à mi-parcours en renvoyant le mensonge de ce groupe d'étudiants face à un autre bien plus vaste et meurtrier qui va bien entendu se révéler afin de les punir de leurs précédents agissements. Soyons honnêtes, ce n'est pas le twist le plus fou de l'année mais il s'avère assez malin et surprenant pour emmener "Malevolent" au-delà du film basique de maison hantée en faisant intervenir une menace plus en phase avec le réel mais pas moins dangereuse.
Enfin, le long-métrage peut aussi se targuer d'une interprétation de qualité dominée par une Florence Pugh (révélée par le formidable "The Young Lady") qui ne cesse d'impressionner en apportant une profondeur étonnante à l'héroïne dans un film qui en recherche désespérément.


Car, oui, malgré ses atouts indéniables, "Malevolent" n'en reste pas moins un film oubliable à cause d'un manque cruel d'épaisseur. Sa courte durée qui l'oblige à aller à l'essentiel en est sans doute une raison mais pas seulement : au-delà de sa trame de fond qui réserve quelques surprises, la manière dont le film étale son récit avec son rouleau à pâtisserie scénaristique se met trop vite à ressembler à un énième cahier des charges du genre dans lequel on coche toutes les cases habituelles à remplir. Couplé à un background qui aurait gagné à être développé pour gagner en impact, ce déroulement finalement très banal d'une histoire pourtant séduisante sur le papier restreint fortement les ambitions qu'aurait pu avoir "Malevolent" de rester dans les mémoires.


Tout en ayant passé un bon moment malgré tout, on ressort de "Malevolent" avec la curieuse sensation d'avoir vu un film dont le potentiel bien présent a été saboté par sa volonté de nager en terrain trop connu, comme s'il voulait satisfaire et répondre aux attentes du plus large public qu'il soit au risque de masquer toutes les qualités qui auraient pu faire sa spécificité. Vraiment dommage car son ambiance, son interprétation de haut vol (oui, bon, on est un peu amoureux de Florence Pugh, on l'avoue) et son histoire bien pensée auraient pu lui faire prétendre à plus. En l'état, il est honorable mais tellement oubliable...

RedArrow
5
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le 5 oct. 2018

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RedArrow

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