Bien trop long et étouffant pour être appréciable

Deux ans après avoir été couronné de succès avec Le Discours d’un Roi, le réalisateur Tom Hooper s’attaque cette fois-ci à un projet d’une toute autre envergure : Les Misérables. Énième version de l’oeuvre intemporelle de Victor Hugo, avec un casting cinq étoiles ? Pas exactement : il s’agit de l’adaptation sur grand écran de la comédie musicale créée en 1980 par Claude-Michel Schönberg et dont le succès international ne faiblit toujours pas. Une renommée que le film se devait de rattraper, voire de dépasser, pour rester dans les mémoires. Ce qui ne sera malheureusement pas le cas…

Pour voir Les Misérables, il faut vraiment être un adepte des comédies musicales. Avec le film de Tom Hooper, ne vous attendez pas à de longues discussions entre les personnages emblématiques nés de la plume de Victor Hugo. Ici, la quasi intégralité des répliques sont chantées. Si vous n’avez rien contre ce genre de spectacle, Les Misérables se présente alors comme la perle dont vous avez besoin. D’autant plus que sur le papier, le long-métrage a de quoi balayer d’une traite toutes les précédentes adaptations du roman, notamment grâce aux moyens mis à disposition et à un casting des plus prestigieux.

Ainsi, vous vous retrouverez face à un film musical qui tente d’innover en faisant chanter ses comédiens directement, sans les faire passer par la case de l’enregistrement en studio. Un procédé jusque-là jamais tenté au cinéma qui demande une préparation démesurée, auquel les acteurs s’y prêtent avec passion. Il faut vraiment les voir déambuler dans de décors splendides tout en arborant de splendides costumes et en poussant la chansonnette pour y croire. Même, chacun arrive à rendre les instants chantés terriblement émouvants par le biais de leur exceptionnelle. Et tout le monde y parvient à sa manière ! Que ce soit Russell Crowe, qui compense sa voix de paquebot par une présence charismatique irréprochable, ou bien Anne Hathaway, qui illumine l’écran de par sa justesse d’interprétation et sa puissance vocale. Autant dire qu’elle n’a pas volé son Oscar de la Meilleure actrice dans un second rôle. Même Helena Bonham Carter et Sacha Baron Cohen, pourtant secondaires, transcendent le film avec leur apparence burlesque qui rappelle un peu l’univers d’un certain Tim Burton, auquel les deux comédiens ne sont justement pas étrangers.

Pourtant, le film se loupe totalement et ce à cause d’un seul détail qui gâche tout ce travail d’orfèvre : la mise en scène de Tom Hooper. Le cinéaste, se sentant encore sur le tournage du Discours d’un Roi, filme ses comédiens comme il l’avait fait avec Colin Firth : par le biais de gros plans. Est-ce pour créer une ambiance quelconque ou bien pour s’assurer que les voix live des comédiens soient enregistrées convenablement ? Nul ne le sait. Ce qui est sûr, c’est ce rendu étouffant donné par la caméra du réalisateur. Coller le personnage et le suivre dans ses moindres faits et gestes à la limite du voyeurisme excessif n’était vraiment pas la meilleure idée. Ce genre de divertissement demande du recul et beaucoup d’espace pour apprécier pleinement le spectacle. Là, c’est comme si vous étiez au premier rang d’une salle de théâtre et que vous observiez la scène avec une paire de jumelles.

Un défaut majeur qui ne fait que s’alourdir avec la durée du film, qui avoisine sans mal les 2h30. Avec ce sentiment d’étouffement qui se répète à chaque séquence, l’ennui pointe très vite le bout de son nez. D’autant plus que les chansons ont beau être splendides à écouter (surtout I Dreamed A Dream), elles n’en restent pas moins monotones, arborant toujours le même rythme lancinant. Ajouté à la mise en scène de Tom Hooper, ce constat ne peut que renforcer l’aspect torture du film, qui empêchera beaucoup de spectateurs de dépasser la limite des 1h30 de visionnage.

Au lieu d’être une adaptation pharaonique, Les Misérables vu par Tom Hooper n’est finalement rien d’autre qu’un fabuleux emballage massacré par son artisan. Le film avait de quoi rester dans les mémoires, il ne sera qu’un puissant somnifère. Peut-être que Tom Hooper n’était pas encore prêt à se frotter à un tel projet. Comme quoi, avoir l’Oscar du Meilleur réalisateur n’est pas un titre qui se confirme au fil de ses propres créations.

Créée

le 15 févr. 2013

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