Une image peut en cacher une autre

En premier lieu touchant, le dernier court-métrage de Jean Eustache nous invite à suivre les échanges entre une photographe assurée et pénétrante (Alix Cléo Roubaud) et un rosissant jeune homme (Boris Eustache, fils du réalisateur). Ils ne se connaissent pas. Lui qui oscille entre gêne et réelle curiosité, par ses questions sur les photographies, offre à l’artiste la possibilité de se confier, entre amours et souvenirs d’enfance.

Par l’échange sur l’art, l’intime se dévoile alors. Mais Eustache n’en reste pas là et malicieusement, sans qu’au départ son spectateur ne s’en aperçoive, subvertit le dispositif initial de son film. Sans s’épancher sur cette perturbation du montage, ludique mais pas que, affirmons ici la puissance du vagabondage poétique qu’elle permet et qui s’offre à nous une fois le trouble dissipé. De ce court-métrage et -circuit où mots et images s’assemblent et parlent malgré tout, la poésie perce et en creux, c’est également Eustache qui fait un trou. Truqueuse et truqueur, Alix et Eustache, Alix est Eustache : « Toute photographie lutte contre la mort, le passage du temps, les ruptures, les choses qu’on ne verra plus. »