L’avantage quand on est un pignouf inculte comme moi ayant encore beaucoup à apprendre et découvrir, c’est qu’on se retrouve souvent sur le cul lorsque notre chemin croise des réalisateurs, des filmographies, des acteurs, et donc des films —des pépites parfois— jusque là inconnus sinon de vague réputation, qui vous en mettent une en pleine face et vous font dire qu’en fait la vie est belle, surtout si ces films dont je vous parle sont si bons et prenant qu’ils vous font oublier la journée de merde à laquelle vous étiez livré avant d’appuyer sur lecture.

Je n’irai pas par quatre chemins : non seulement 13 Tueurs est un bon film, mais en plus c’est un putain de bon film.

J’avais la version de Miike sous le coude depuis un petit moment, mais il était bien sûr hors de question d’y jeter un œil sans avoir vu l’original de Kudo d’abord. Ça fera sans doute plaisir à certains de mes éclaireurs de voir que pour une fois j’ai fait les choses dans le bon ordre (hein, drélium).

Passé la légère confusion du début due à la profusion de patronymes qui pourraient un poil égarer le japanophile convaincu, on est vite emporté par l’efficacité de la mise en scène qui tisse très rapidement une ambiance de complot et une tension palpable servant admirablement l’intrigue politique sous jacente ; moteur d’un film qui s’avère, au delà d’une histoire d’assassinat programmé, être un portrait fidèle du japon du milieu du 19° siècle. Intrigues politiques, donc, et questionnement sur la voie du guerrier ; race dont les fondements sociétaux et philosophiques se retrouvent ébranlés par l'évolution d'une civilisation japonaise alors sur le point de subir une mutation comptant parmi les plus rapides du monde moderne.

Kudo, nous sert non seulement un bijou de mise en scène serti d’acteurs impeccables et d’une réalisation solide, mais il le livre dans un écrin magnifique aux images d’une beauté formelle indiscutable. Compositions riches et flopées de cadrages remarquables achèvent de séduire l’amateur de monochromes intemporels nippons.

Et puis encore une fois, le cinéma japonais m’a offert une scène de shamisen mémorable, tout en tension et en beauté, alors que Shinzaemon apprend la vie à son nonchalant neveu ; à ranger pour son intensité émotionnelle pas loin de celle de Tange Sazen ; bien que les couleurs soient différentes.

Film choral, acteurs au top, personnages charismatiques (Shinzaemon et Kito en tête), bravoure, honneur, sens du devoir et philosophie guerrière vous attendent aux détours d’une intrigue qui se paie le luxe, mesdames et messieurs, oui, le luxe, d’être intrigante (c’est tellement rare de nos jours, ça mérite d’être souligné). Vous qui aimez le suspens, les sushis et le noir et blanc, vous n’avez que le chambara du choix.

Les passages de sabre —plus lisibles que les bastonnades modernes, s’avèreront d’ailleurs appréciables pour qui, comme moi, s’est plongé récemment dans le genre.

Dommage que la scène de siège finale, pourtant délectable et prenante, perde en impact ce qu’elle affiche en durée ; seul bémol à relever pour ma part. Mais rien de grave d’autant que l’épilogue, acide et d’une vive ironie, peut aisément justifier à lui seul l’insistance avec laquelle ce passage est traité.

Comme disait Michael T. Weiss dans le Caméléon : La vie est un Kudo.



P.S: Merci à @drélium pour la découverte
real_folk_blues

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