Voir le film

Après avoir séduit le grand public avec Le Hérisson, Mona Achache réalise un film plus intimiste, un film où elle parle d’elle, de sa mère, de sa grand-mère et de son deuil. Face à la perte soudaine d’un parent suicidé, il est nécessaire de trouver des réponses face à cette sensation d’inachevé. Parfois elles s'imposent à nous, à travers des matières laissées par le défunt, et le deuil peut laisser ce besoin de chercher plus loin, pour comprendre le geste qui a conduit à la mort. C’est cette recherche qui a conduit Mona Achache à ouvrir les 25 caisses remplies de souvenirs que sa mère avait laissé. Dans ces caisses, elle y trouve une enquête transgénérationnelle, de sa mère sur sa propre mère et de sa mère avant elle sur la sienne, dans une famille issue du milieu littéraire où les mots ont toujours eu le pas sur la mort.

A l’aide d’archives constituées de mots, de notes, d’enregistrements sonores, de vidéos, de photos, elle tente de mettre en forme les choses pour comprendre qui sont ces femmes, de l’intérieur. Elle cherche ce qu’il y a de plus profond en elles, jusqu’à épuisement. De ce travail ressort un schéma qui semble se répéter de manière inexpliquée, de mère en fille. En rassemblant ces matériaux qu’elle accroche, suspend, colle dans son appartement, elle regarde chaque matière avec un regard un peu plus neuf, minutieux, pour en produire un collage gigantesque et vertigineux. Ce puzzle de la vie qu’elle reconstruit pièce après pièce touche à son intimité mais est rendu universel par l’époque que ces souvenirs traversent et les célébrités que ces femmes ont côtoyées. Ce film est aussi une histoire de femmes en milieu d’hommes et Mona choisit de libérer la parole des femmes et leur vérité dans une ère post Me Too. Elle donne corps à ce discours en faisant incarner sa mère par Marion Cotillard au sommet de son art, qui rejoue la mère de Mona Achache en vase clos, produisant ainsi une conversion post-mortem. Le film est touchant et plastiquement, très beau. Le montage vient faire résonner des images picturales à des images documentaires. Par les traces et preuves laissées par sa mère et sa grand-mère, par le processus d’imitation, on obtient une substance et on se retrouve face au sentiment étrange de re-donner la vie aux morts, de trembler d’être tant touchés par ces présences fantomatiques. Le film vient nous saisir au plus profond de notre être, rappelant la fragilité de notre existence et l’impact qu’ont les traces laissées par les morts sur les vivants.

Créée

le 6 déc. 2023

Critique lue 18 fois

Critique lue 18 fois

D'autres avis sur Little Girl Blue

Little Girl Blue
Cinephile-doux
5

Sur la vie de sa mère

Dans cette famille, les filles écrivent sur la vie de leurs mères depuis deux générations. Mona Achache, elle, a choisi la voie du documentaire pour essayer de la comprendre, elle qui a laissé tant...

le 1 juil. 2023

6 j'aime

Little Girl Blue
VacherinProd
6

Carole Anyways

Un peu comme l’animation ou encore le noir et blanc, pour moi, le documentaire n’est pas réellement un genre, mais un médium. On ne réfléchit pas la réalisation d’un documentaire comme n’importe...

le 18 nov. 2023

5 j'aime

3

Little Girl Blue
Propppane
10

Pas facile d'aimer le cinéma

C'est pas forcément un chef d'oeuvre donc je n' irai pas me battre pour ce film. En tous cas c'est clair que ça n'est pas un film qui se laisse apprivoiser. Avec le sentiment que ce film a été conçu...

le 20 nov. 2023

3 j'aime

Du même critique

Blackbird, Blackberry
nebuleuse_chimere
7

« Et toi, comment es-tu devenu un gentil chien au milieu de tous ces loups ? »

La crise de la quarantaine, c’est ce moment où l'on se retourne pour regarder sa vie, méditer sur les choix qui nous ont conduit ici et maintenant avec plus ou moins de regrets. Ethéro, elle, a 48...

le 6 déc. 2023

Little Girl Blue
nebuleuse_chimere
7

Une conversation post mortem

Après avoir séduit le grand public avec Le Hérisson, Mona Achache réalise un film plus intimiste, un film où elle parle d’elle, de sa mère, de sa grand-mère et de son deuil. Face à la perte soudaine...

le 6 déc. 2023