Deuxième film du dyptique amorcé par "Jean de Florette", voici une belle suite réussie. On a tous les ingrédients qui font le sel de Pagnol : le sud, l'accent du sud, les beaux dialogues sur la nécessité de se marier, les secrets familiaux.
Attention je vais spoiler sans scrupule.
Ce que j'aime bien avec Pagnol, c'est que les intrigues elles sont resserrées et pas hyper-compliquées. Les choses ne partent pas dans tous les sens, chaque truc est important. On savoure la lenteur de l'intrigue. Par rapport au 1er film, la mise en place est plus lente et un peu contemplative au début. Le quotidien s'est installé depuis les événements du 1er film 10 ans plus tôt donc il se passe pas grand-chose de révolutionnant au début.
Je résume le film : Ugolin aime Manon mais elle peut pas le piffrer. Manon bouche la source du village pour se venger. Le méfait d'Ugolin et le Papet (cf 1er film) est révélé. Ugolin se suicide. Manon débouche la source.
Je suis un fan absolu de tous les dialogues entre Montand et Auteuil. "Des gros tétés, des longues jambes, des hanches larges. Choisis-là comme une jument poulinière". Ces deux-là sont les méchants de l'intrigue, mais ils ont leur côté touchant et on vient à les plaindre pour leurs histoires de cœur ratées. Auteuil est génial en imbécile qui crève d'amour pour la belle Emmanuelle Béart (pas de bol, la belle se méfie de lui pour ce qui est arrivé à son père). Montant est impérial. Il alterne une face sombre (manipulateur et menteur) avec une face positive (aimant son neveu, amoureux déçu de Florette, pétri de remords à la fin) qui le rend presque sympathique. A la fin c'est terriblement triste qu'il comprenne qu'en fait Jean de Florette c'était son fiston et qu'en fait c'est lui qui a causé la mort de ce fils qui lui a manqué toute sa vie.
Les gentils finalement sont un peu moins marquants. Dans le 1 y'avait le truculent Depardieu qui était un contrepoint efficace au duo Auteuil/Montand. Là dans Manon les héros ont des personnalités plus effacées.
Béart est jeune et hyper belle, mais elle ne dit pas grand chose et joue avec son regard. C'est logique après tout : elle joue une bergère farouche qui s'exprime plus par l'action que par la parole. J'aime bien son jeu tout en rancœur sourde qu'elle finit par exprimer ouvertement à la fin (scène de l'école), c'est la 1ere fois du film où elle dit ce qu'elle a sur le cœur.
Le beau gosse qui joue le maître d'école me fait un peu l'effet d'un héros à la Tintin : fort en tout, gentil, sans aspérités, sans défauts. Du coup il ne m'a pas tellement marqué. L'acteur au fait c'est le papa de la très canon Ana Girardot qui joue dans "les Revenants".
J'aime bien toute la visite de Ticky Holgado qui joue un gars expert du génie hydraulique avec un accent pas possible.
Comme souvent chez Pagnol, l'intrigue tourne finalement autour de problèmes de paternité avec une histoire de gamin élevé par un père qui n'est pas son père. On retrouve ce thème aussi dans la Fille du Puisatier et dans Marius/Fanny. Je ne connais pas très bien la bio de Pagnol mais peut-être que ce truc d'enfant caché ça l'a marqué d'une manière ou d'une autre.
Au final on retient : le soleil, des dialogues marquants avec l'accent du sud, une histoire d'injustice qui est réparée.
Un très beau film avec de grands acteurs, que je prends plaisir à revoir de temps en temps.