Monstres contre Aliens vient clore une décennie riche en projets pour Dreamworks Animation, où plusieurs séries majeures ont été lancées et ont conquis les petits (et les grands, un peu), à l’image de Shrek, Madagascar ou Kung Fu Panda, déclinés en suites, séries télévisées et bien sur produits dérivés pour faire cracher le porte-feuille du parent.

Monstres contre Aliens aura connu une postérité plus discrète : quelques courts-métrages et une série animée principalement. Le film n’aura empoché « que » 180 millions de dollars à sa sortie sur les écrans de cinéma. La loose ?

Pourtant, avec un tel titre, il y avait une chouette promesse, un mélange qui aurait pu être audacieux. Ces monstres, la jeune Susan Murphy va vite y être confrontée, et même en devenir un malgré elle. Car le jour de son mariage elle reçoit sur le coin de la caboche une météorite qui la rend gigantesque. Tout de suite « réquisitionnée » par l’armée et envoyée dans une base évidemment secrète, elle est mêlée à d’autres créatures regroupées ensemble depuis les années 1950, Dr Cafard, savant fou transformé en insecte, Le Maillon manquant, créature mi-singe mi-poisson extirpée d’un bloc de glace, BOB, gélatineux et simplet et Insectosaure, monstre asticot encore plus grand que Susan, renommée Génormica.

Les plus grands s’amuseront des clins d’oeil aux vieux films de série B des années 1950 et à d’autres références plus actuelles, mêlant aussi bien L’Attaque de la femme géante, Vincent Prince, L’Étrange Créature du lac noir, le Blob, Godzilla mais aussi Star Trek ou Rencontres du troisième type. Pour autant, le film n’utilise pas aussi bien le cadre et les attentes de cette bonne vieille SF pour dynamiter son histoire, contrairement à ce que fera l’année suivante le réussi Megamind et la déconstruction de la relation de Superman avec son ennemi juré.

C’est que Monstres contre Aliens est un peu planplan. Son grand méchant extraterrestre n’a rien pour lui, si ce n’est une évidente et attendue conquête des Terriens sans aucune touche parodique pour enrober l'affaire. L’envoi d’un robot géant taper un peu du pied offre tout de même quelques belles scènes de destruction, dont la pauvre San Francisco sera bien malgré elle victime. L’affrontement sur le Pont du Golden Gate dans son rapport d’échelles entre la menace et ces monstres héroïques vaut son pesant de pop-corn.

Cependant, le tout reste un peu lisse, se voulant peut-être un peu trop familial, voire enfantin. A aucun moment il ne sera question que ces monstres puissent faire peur le spectateur, et s’ils le font sur une petite portion de la population, c’est l’incompréhension de leurs actes lors d’une fête donnée qui offre une scène avant tout humoristique. On s’étonnera d’ailleurs que ces monstres pour certains cachés depuis des décennies soient lâchés dans la nature en tout confiance puis approuvées comme des héros, sans que leur geôlier ne s’en excuse ni même que les créatures ressentent un quelconque ressentiment. Leur personnalité tout comme la cohésion du groupe avec l’arrivée de Susan sont d’ailleurs des éléments assez rapidement esquissés, avec une économie un peu regrettable.

Ce qui est plus intéressant pour le film, sans qu’il ne l’avoue vraiment dans son titre, c’est que Susan occupe une place plus que centrale, elle est prépondérante. Bien plus qu’une histoire de monstres et de l’habituel discours de la tolérance, le film de Dreamworks est en fait bien plus féministe qu’il en a l’air. La falote Susan du début, dont les états d’âme n’émeuvent guère, devient avec Génormica une femme forte, bien au dessus de tout, physiquement d’abord mais aussi métaphoriquement. Elle va ainsi refuser le destin qui lui était promis, son mariage avec l’égocentrique Derek, à le suivre dans ses désirs et ses envies.

En devenant plus qu’un monstre mais une super-héroïne, détachée de son carcan sentimental, Susan peut s’exprimer d’autant mieux que le film semble aussi suivre cette idée techniquement. Si la représentation du quotidien est fade, avec ses décors qui se ressemblent, et ses humains qui ont des têtes de poupées, sans aucun intérêt esthétique et sans travail technique, typique de ces années 2000 où les films animés (et en 3D) se ressemblaient un peu tous, Monstres contre Aliens s’amuse beaucoup plus avec l’imaginaire mis en scène. Si le film reste maladroit pour les visages humains, ses monstres ont des textures riches, de la matière, de l’énergie, de l’allure. Le Chaînon manquant a de belles écailles luisantes, Blob avec sa transparence gélatineuse est réussi. Quelques efforts de mise en scène sont à saluer, rappelant les meilleurs films de monstre ou parodiant quelques scènes classiques, mais une fois à hauteur d’homme le film révèle à nouveau son classicisme visuel.

Monstres contre Aliens ne semble pas à l’aise avec son sujet, s’amusant avec ces Monstres sans vraiment s’appuyer dessus, pour offrir une histoire finalement assez classique, parfois même trop simplifiée, mais avec ses quelques moments plus réussis. Pourtant, avec Susan, derrière les monstres et les aliens se cache donc la femme, avec un message féministe et émancipateur assez bien vu, timide mais présent et réussi.

SimplySmackkk
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le 24 juin 2022

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SimplySmackkk

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