Nino et Bruno entament une fructueuse carrière comiques dans les années 70. Sans réel talent, ni même envie de faire rire, le binôme déclenche l'hilarité auprès de son public grâce aux nombreuses paires de claques que Bruno distribue sur les joues de Nino. Avec le succès, viennent la rancœur puis la haine à mort. Cette issue tragique est affichée dès le début du film, puisque le récit est un gigantesque flashback pour montrer comment on en est arrivé là (comme dans Sunset boulevard par exemple, mais on est pas à un 1000e du génie de Wilder).

Il est toujours difficile de se montrer sévère avec les films d'A. de la Iglésia. Il propose depuis près de 3 décennies des comédies vitaminées, souvent bancales mais sympathiques. Parfois le rendu est emballant (le crime farpait, les sorcières de Zuggarramurdi, le jour de la bête), et parfois l'énergie et le mauvais esprit ne suffisent pas à sauver l'ensemble du label comédie poussive. 

C'est le cas de Mort de rire, qui comprend son lot de bonnes idées, mais dont l'ensemble est plombé par un récit trop prévisible. L'idée de base était séduisante : imaginer les relations dégradées d'un duo comique, où l'un est le faire valoir de l'autre. Une relation de dépendance toxique où l'orgueil et la jalousie tuent à petit feu la faible complicité du départ. Le succès du duo ne repose que sur des claques, un peu comme les duos ou trios d'antan (Laurel et Hardy, ou les 3 stooges), est un poil facile et surtout peu crédible. Il aurait été plus intéressant de faire en sorte que l'expression comique passe par la parole. C'est certes plus compliqué à écrire, mais infiniment plus intéressant pour cristalliser la rancœur de deux adultes. 

J'ai bien conscience que le film n'est pas du tout réaliste, ni même profond, et que la violence symbolique de la baffe est un élément déclencheur dramatique plus logique pour faire basculer le film dans le sang, mais au final ça rend le film un peu lourd. Avoir des comiques pas drôles dans une comédie, c'est comme avoir un serial killer qui fait pas peur dans un Thriller. C'est très pénalisant.

On pourra me rétorquer que leur numéro sur scène n'est certes pas marrant, mais qu'hors des planches, ils le sont. Peut-être, plus, à de rares occasions, et surtout par le biais de la mise en scène (la fausse soirée chez Nino, le casting pour remplacer Nino) et des looks de merde (gag à la portée de tout le monde). Mais c'est trop peu.

Sur un thème proche, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à l'épisode d'Inside n°9 la loge de Bernie Clifton, sur la réunion de 2 comiques ringards que tout oppose et qui consentent à jouer une dernière fois leur numéro. En 22 minutes, l'épisode est plus drôle, 100 fois plus fin et dit plus de choses sur le sujet que ce film assez bâclé de près de 2 heures de la Iglesia.

Un mauvais cru donc.

Negreanu
4
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le 30 sept. 2022

Critique lue 45 fois

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Negreanu

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