Nanouk l'Esquimau raconte l'histoire d'un esquimau saveur pistache, enrobé de délicieux chocolat ainsi que quelques noisettes. Celui-ci se fait sucer pendant 20 secondes puis se fait manger. FIN.


Qu'est-ce qu'on se marre.


Robert Flaherty filma dans les années 10, de nombreux documentaires, des réalités inconnues du public. Mais si on connaît ce grand nom aujourd'hui, c'est grâce à ce semble être le tout premier long-métrage documentaire : Nanouk l'Esquimau.


A cette époque, les documentaires sont muets et vraiment chiants car on se contente de montrer quelques images peu intéressantes. Mais Flaherty nous offre ici, tel Tintin au Congo, une vraie découverte d'un monde encore méconnu aujourd'hui. Tel un ingénu nous rencontrons des Inuits, et plus particulièrement le charismatique Nanouk. On va suivre ce personnage pendant une heure, sans le moindre son, sans le moindre artifice. Et... c'est fabuleux.


Nanouk fait un camping avec ses potes


Premièrement nous découvrons notre protagoniste dans son bateau a priori monoplace avec son enfant allongé sur la coque du transporteur. Puis... oh, regardez qui sort du trou où était assis Nanouk. Nyla sa femme, son bébé, une autre femme et... son chien. Ingénieux ces glaçons ! Ensuite Nanouk fait un feu avec la tribu, construit un truc, se promène.


Nanouk fait les courses


Notre homme décide de faire du commerce, sans être passé par HEC. Le con. Il échange des fourrures hauts de gamme fraîchement chassées, que s'amuseront à porter les plus riches vivants un peu plus au sud. Il échange une vraie petite fortune contre des couteaux, de la nourriture, quelques bonbons. Ces hommes profitent de leur innocence. Enfoirés d'américains. Mais dans leur arnaque, ils ont la gentillesse de faire découvrir le gramophone à nos stars. Le spectateur s'attache à ces adorables personnages qui cherchent la voix enregistrée de l'homme blanc sur la machine. On découvre leur découverte, c'est magique.


Nanouk le barbare


Nanouk c'est pas un pédé, Nanouk c'est un guerrier. Il pêche le poisson à la ligne, le tue avec ses dents, et le bouffe sans même le cuire. Ouais, il déconne pas, il chasse même le phoque au harpon, il fait un gros doigt à la WWF. Lui, c'est Man vs Wild, et il triche pas comme l'autre abruti de Bear Grills qui prend tout le monde pour des cons en jouant sur le spectaculaire. D'ailleurs, Nanouk, ça veut dire Ours, donc Bear en anglais. Salaud d'usurpateur.


Nanouk le scientifique


Certes c'est un bourrin, mais il est intelligent ce mec. Et là, nous avons une scène d'anthologie, une référence du ciné doc', où le réalisateur ne nous explique rien, on observe notre esquimau qui étudie la glace, et là... qu'est-ce qu'il fait ? Il fait un trou dans la glace. "Ah ouais, il fait un trou pour pécher du poisson, j'ai vu ça dans des dessins-animés !". Eh bah non. Avec cette rondelle de glace, il va faire une fenêtre. Ouais ma gueule, une fenêtre en glace pour attirer les rayons du soleil dans son igloo construit en deux temps, trois mouvements. Et ça change de nos igloos de merde qu'on faisant lors de nos vacances au ski. Un génie ce Nanouk.


Nanouk est fier, notamment de ses chiens et autres loups domestiqués. Ces huskys mignons, ces bébés dont il prendra soin, ces loups aux dents aiguisés qui attend son tour pour manger un cadavre de phoque ou autre morses. Flaherty filme le rapport entre l'Homme et l'environnement de façon bien plus intéressante que le documentaire lambda. En effet, ses plans sont magnifiques et la réalisation splendide. Il montre toujours l'eau, les glaciers en 'petite plongée' où on voit jamais le ciel mais toujours l'horizon et la mer.


De plus, la chasse au morse est géniale car, le cinéaste gère le suspens en un plan unique. Nanouk traque, attend le moment opportun, passe à l'assaut, et enfin vient l'épreuve de force où il sera soutenu par ses copains. Et un morse, c'est pas n'importe quoi. C'est un peu comme ta grande tante, tu vois.


Eh ouais un documentaire, ça peut être cool.


Il y a d'autre choses fabuleuses à découvrir, allez-y, découvrez ce petit monument. Cependant, tout n'est pas parfait. D'ailleurs il y a énormément de choses de jouer. Par exemple, nous sommes plus ici dans une fiction qu'autre chose, car Nanouk a toujours été célibataire, sans doutes puceau. Sa femme et ses gosses ne sont pas à lui, ils jouent un rôle. C'est une petite tricherie qui permet de renforcer la réalité du docu', utile donc. On parle donc de Docufiction, dont il est le fondateur du genre.
Il y a même plein d'erreurs de montage. Multiples faux-raccords, lors du retour à la pêche. Les reconstitutions de scènes sont flagrantes et ne font pas toujours naturelles, comme lorsqu'on voit tantôt Nanouk avec son sac, et la scène d'après sans. Quelques erreurs de plans par-ci, par-là qui gâchent un peu le tout, mais qui ne nuit pas au visionnage pour autant.


Après avoir finit son tournage, Nanouk dit à Flaherty de rester encore une ou deux années, et qu'il pourra montrer plein de choses extraordinaires avec sa caméra. Malheureusement question de production, ce fut impossible, et le réalisateur déclina la proposition. Deux ans plus tard, on apprit que Nanouk ne reviendra jamais d'une chasse. Adieu Nanouk, lui qui était si heureux de partager sa vie.


Ah oui au fait. Lors de la projection en 1922, un certain Christian Nelson inventa une friandise, une barre de glace, inspiré par le film. 'Eskimo Pics' que ça s'appelait et se vendit très bien. L'idée fut ensuite exploité en France par Gervais. Voilà, la naissance de l'Esquimau, grâce à Nanouk ce héros.

Alex-La-Biche
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le 4 oct. 2014

Modifiée

le 4 oct. 2014

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Alex La Biche

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