Au Chili, les communistes commencent réellement à être mal vus. Du coup, le poète Pablo Neruda est obligé de se planquer avec sa femme. Pas besoin d'en connaître beaucoup plus pour apprécier le film.
★★☆☆
Film troublant, Neruda peut difficilement laisser indifférent. Au mieux, il distillera un délicieux parfum de mystère onirique, au pire il agacera profondément. Avant toute chose, il ne faut pas aller voir ce film pour sa beauté visuelle que l'on vante un peu partout. La réalisation est soignée et souvent esthétique, certes, mais elle est d'un classicisme à toute épreuve. Les seuls effets sont des ruptures d'unité de lieu dans le champ/contrechamp des dialogues et un usage de la lumière perturbant (amis des contre-jours, bonjour). Pas de quoi se rincer l’œil outre-mesure.
Là où le film prend tout son sens, c'est dans le double portrait du poète chilien. Suite à un tour de passe-passe scénaristique qui ne prend sens que dans la dernière partie, l'ambivalence entre un Neruda bourgeois et fatalement éloigné du peuple qu'il défend et un Neruda grande gueule avec des convictions fortes et critique envers sa propre condition est parfaitement rendue et se révèle même passionnante si on prend la peine d'interroger à nouveau le film. Le soin apporté à l'écriture du policier traqueur (interprété par le trop rare Gael García Bernal) en est la principale preuve.
Neruda est une œuvre difficilement accessible et, à ce titre, n'est pas exempte de défauts. Le réalisateur joue avec ses personnages pour mieux se jouer du spectateur et franchir la frontière entre réalité et fiction.
- Si vous avez manqué le début
Dans une grande pièce richement décorée, des hommes discutent avec véhémence et en mettent plein la tronche à Pablo qui serait un traître de la nation et tout et tout. Là, le gars débarque avec sa bonhommie habituelle et se met à pisser contre le mur. Ah oui, on est dans des chiottes. Normal.