Normandie nue par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Et si nous allions faire un tour dans ma région du Perche. Il s'y est passé un événement peu banal pour celles et ceux qui veulent bien y croire.
Dans le petit village de Mêle-sur-Sarthe, à deux pas de Mortagne au Perche, l'agriculture est la principale activité. Les fins de mois sont loin d'être aisés pour cette population. Certaines exploitations sont endettées et la colère est logiquement au rendez-vous des habitants. Ceux-ci organisent une manifestation avec le soutien du Maire de la commune Georges Balbuzard, et barrent la route nationale afin de faire valoir leurs revendications et attirer les autorités et les journalistes régionaux à prendre conscience de leur sort et en informer les téléspectateurs.
C'est alors que dans le bouchon qui se forme arrive incidemment Newman, un photographe américain, célèbre et têtu. Pour le Maire il s'agit là peut-être d'une aubaine. Le photographe connu pour ses photos "d'ensembles de corps nus" va peut-être servir les intérêts des habitants grâce à ce don de l'image. L'avenir nous le dira...
La situation de ce petit village n'est pas florissante et il faut agir vite. Néanmoins nous vivons par cette œuvre l'ambiance de la campagne où parfois l'individualisme rejoint celui des grandes villes.
Lorsque le Maire propose une solution inattendue et originale, se mettre en scène nus dans un pré et se faire filmer par les chaînes d'information, la division éclate pour des arguments parfois futiles, ancestraux et où pointe la jalousie.
Tout devrait se jouer dans "Champ Chollet", un espace issu d'héritages familiaux presque abandonné mais dont le propriétaire ruiné ne mâche pas son opposition, "c'est le champ de ses ancêtres", un point c'est tout. Pourtant le photographe soutenu par le Premier Citoyen de la commune est obnubilé par cet endroit précis.

Comme partout il y a "l*es pour et les contre*" et c'est un véritable "Clochemerle" que va vivre le village. Le Maire est épuisé, attaqué ou félicité. Les revendications ne deviennent plus une priorité. Pourtant l'avenir du petit village et de ses rares commerces est de vivre ou mourir et c'est vers cette dernière solution que les lendemains semblent s'engager dans ce climat délétère. Bref toutes et tous ne sont pas prêts à montrer leur anatomie et cette pudeur arrive même à provoquer de graves problèmes familiaux et communaux.

Eh bien voici un film qui à mon avis reflète l'ambiance de ces petits bourgs où chacun s'observe, s'épie, se chamaille, se réconcilie et vit parfois avec un passé toujours tenace dans l'esprit. Certes on veut bien manifester son mécontentement à la méthode traditionnelle mais on ne veut surtout pas innover, employer des solutions qui heurtent les traditions et notamment la pudeur de ces messieurs. Ont-ils l'appréhension de comparer avec d'autres certains attributs de leur corps ? Ont-ils l'appréhension de voir leur épouse comparée à d'autres et attirer les regards? Peur des railleries et des ragots ? La solidarité est bien loin et on en vient aux querelles anciennes de voisinage. Voici pourquoi je citais ce fameux roman de "Clochemerle", la tradition c'est la tradition.
Philippe Le Guay, le réalisateur, a parfaitement analysé une ambiance qu'on connaît bien où le courage ne manque pas ni les bonnes intentions mais où rien n'avance car mêlés aux traditions, à une morale d'un autre âge. Les jeunes partent lassés par cette ambiance routinière et moraliste. Chacun d'eux veut vivre sa vie et ici Georges Balbuzard le Maire, remarquablement interprété par François Cluzet, a très bien compris qu'il y avait une opportunité à saisir pour sortir sa commune de la léthargie.
Il est difficile dans ce film de faire ressortir des acteurs en particulier car ils collent tous parfaitement à leur rôle. Je vais tout de même nommer François-Xavier Demaison, Julie-Anne Roth, Toby Jones et Pili Groyne sans oublier les "concitoyens" tous véridiques.

Voici donc une cartes postale très "animée" d'un ravissant petit coin de France longtemps oublié par les autorités où vivent des gens tout de même très attachants. Philippe Le Gay nous le témoigne et vous pourrez le découvrir en faisant honneur à ce joli film.

Box-office France: 595 461 entrées

Note: 7/10