Comment juger avec un œil du XXIe siècle une œuvre qui a bientôt 100 ans ?
C'est vrai, après tout, quelqu'un (comme moi) qui ne s'y connaît pas trop en cinéma ne pourra pas porter un regard axé sur la technique. Je me fierai donc à mon ressenti.
Ça fait longtemps que je voulais voir ce classique de l'épouvante, considéré comme le précurseur du genre. C'est très intriguant, un film d'épouvante muet. Mais franchement, ça rend bien.
J'ai vu la version de 1994 avec la musique de Galeshka Moravioff, et je dois dire que si la musique ne colle pas du tout à l'action, elle sert surtout d'ambiance, et accentue énormément, dans ce cas-ci, le côté horrifique. Je pense que chaque version doit par conséquent être très différente. Dans le cas de Galeshka Moravioff, c'est l'influence très contemporaine, atonale de la musique qui lui accorde ce caractère malsain, macabre.
Le scénario est très minimaliste, l'accent est surtout mis sur l'esthétique. Comme le confirme un certain classement, Nosferatu le Vampire est emblématique de l'expressionnisme allemand : le personnage de Nosferatu en lui-même est déjà humanoïde, mais certaines scènes, comme les cultissimes scènes d'ombres, accentuent encore plus l'effet de déformation. Et ça rend Nosferatu particulièrement malsain, donc flippant, en un certain sens. On trouve même quelque chose d'Hitchockien (je me permets l'anachronisme) par le traitement du voyeurisme.
C'est le premier film muet que je vois qui n'est pas humoristique, et je dois dire que ces jeux d'acteurs très primitifs et ces vieilles images authentiques accompagnées d'une telle musique... Le tout rend le film particulièrement macabre, et je me suis surpris à craindre vraiment certaines images. Donc c'est réussi !