Avec Old Boy, le réalisateur Park Chan-Wook nous présente une nouvelle fois la vengeance double, croisée, à travers deux personnages.
Le premier, Oh Dae-su, est un homme bavard, expansif, provocateur, dont les bravaches et la gouaille finissent par causer la perte. Il se retrouve enfermé pendant 15 ans, avec pour seule occupation un poste de télévision et le creusement d'une issue. Brièvement, le réalisateur coréen montre la pernicieuse boîte à image, son influence sur l'homme. A travers cette condition de prisonnier, on sent poindre la critique d'une société dans laquelle ce média devient trop important, ami de l'être humain, objet de fantasme, moyen de communication (au sens propre du terme mais aussi de manière abstraite).
Et puis vient la liberté et le goût de la vengeance, poussé par le fait de n'avoir plus rien à perdre (étant recherché pour le meurtre de sa femme), la liberté totale dans les actes d'un homme qui n'a d'autres motifs de vivre. Pourtant les questions quant à l'après existent ? Se sentira-t-il mieux ? Soulagé ?
Celles concernant l'avant sont toutefois prioritaires : pourquoi l'a-t-on enfermé pendant tout ce temps ?
On découvrira bien entendu les raisons de cette détention, de cette torture et l'on s'attachera aussi à la personnalité trouble mais intriguante de l'autre personne animée de vengeance.
Car le ravisseur nourrit lui aussi le désir de faire payer l'autre. Mais très vite on entr'aperçoit que ce motif de vengeance cache des sentiments contradictoires ; au sommet de sa tour d'ivoire, malade, le jeune homme souffre de solitude et s'est découvert en Oh Dae-su un compagnon. Est-ce un élan d'amitié sincère ou est-ce juste un attachement crée à force d'observation pendant de longues années... comme l'on s'attacherait à un personnage de série TV (tiens donc !). Quoiqu'il en soit la vengeance de cet homme amoureux de sa soeur n'est pas pure objet de rancune.
C'est pour cela que l'on aime l'oeuvre de Park Chan-Wook, sa vision de la vengeance et de l'être humain est d'une acuité redoutable, d'une profondeur étonnante et ne laisse pas de combler le spectateur par son originalité. La réalisation est qui plus est une nouvelle fois de toute beauté et à le mérite d'accorder une plus grande importance aux musiques (par rapport à Sympathy for Mister Vengeance), celles-ci étant tout simplement sublimes, que ce soit pendant les phases d'action ou pour mieux souligner la quête dramatique de Oh Dae-su. Il est juste dommage que les retournements soient un peu faciles et grossiers même s'ils ne plombent pas le scénario pour autant.
Quoiqu'il en soit le triptyque sur la vengeance de Park Chan-Wook est une formidable analyse de la conscience humaine, un solide monument qui sait partir d'une base restreinte pour arriver à un résultat grandiose. Le tout sur un trépied costaud et joli à regarder.
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