Choisir des stars pour un premier film, c'est à la fois prendre un risque et ne pas en prendre. Le risque, c'est que les acteurs prennent le dessus sur les propositions du novice : Reda Kateb ferait du Reda Kateb, Benoît Magimel ferait du Benoît Magimel, ils ne feraient pas du Elias Belkeddar. L'absence de risque, c'est que cela garantit un certain succès du film, c'est à dire que les choix esthétiques du réalisateur ou leur absence seraient cachés par la performance des acteurs : on filmerait Magimel et Kateb, plus que du Belkeddar. Omar la fraise est un peu dans ce cas de figure en demie-teinte.
Malgré tout, le primo-réalisateur parvient à créer sa signature dans l'ambiance du film. L'affiche vantait "du Tarantino algérien", de manière très exagérée, mais on comprend quand-même un peu pourquoi. On est dans une histoire de gang, de violence, de dialogues insignifiants... On est aussi chez Scorcese, côté mafia, chez Kubrick, côté héros déchu. Ce mélange d'influences, pas très algériennes, est recouvert d'une sauce musicale et paysagère franco-algérienne, qui construit l'ambiance et en donne un goût d'originalité. La signature du cinéaste, c'est donc le personnage féminin, Zohra, interprété par Meriem Amiar, moins connue que ses deux accolytes, donc potentiellement moins Meriem Amiar que Meriem Amiar-Belkeddar, c'est-à-dire Zohra (on ne voit pas la comédienne mais son personnage), qui essaie de faire face à ces hommes forts, comme le cinéaste face aux stars. La signature d'Elias, c'est aussi et enfin les fraises, physiquement absentes du film mais présentes à trois reprises dans les dialogues, pour expliquer, à chaque fois d'une façon différente, le surnom d'Omar. Omar la fraise, c'est un mélange de France (fraise) et d'Algérie (Omar), et c'est un faux nom de gangster. Entre la violence de l'instrument du dentiste, et la douceur sucrée du fruit, rouge comme le sang et comme l'amour, la fraise résume tout le film, mais elle est suremballée par Omar, Kateb.
En somme, Omar la fraise acquiert un certain capital sympathie, malgré tout, mais il faudra attendre les autres films du réalisateur pour tenter de voir qui est Elias Belkeddar et ce qu'il a à nous dire.

Alfred_Babouche
5
Écrit par

Créée

le 6 août 2023

Critique lue 9 fois

Alfred_Babouche

Écrit par

Critique lue 9 fois

D'autres avis sur Omar la fraise

Omar la fraise
RocketMan21
4

Sirop de fraise très dilué.

L'impression d'un film qui n'a pas réellement de début et qui traîne et s'étire pendant 1h30. Benoît Magimel réussi à capter et tenir le film de part son charisme et sa prestance tout comme un bon...

le 20 mai 2023

16 j'aime

5

Omar la fraise
Fêtons_le_cinéma
6

« L’honnêteté ça paie pas »

Sur le plan du récit, Omar la fraise est un peu ce que Night and the City (Jules Dassin, 1950) est au polar : comprenons les tribulations de personnages médiocres, petites frappes sans talent ni...

le 31 mai 2023

9 j'aime

Omar la fraise
constancepillerault
7

Critique de Omar la fraise par constancepillerault

Film qui tarde un peu à démarrer, car au départ, le mélange film de gangsters parsemé de violence et l'humour de certaines autres situations ne prend pas (comment rire de certaines scènes, filmées...

le 26 mai 2023

8 j'aime

Du même critique

J'accuse
Alfred_Babouche
8

Zola et Polanski

La faute de l’abbé Mouret. Roman Polanski est un gros dégueulasse. Roman Polanski est aussi un immense réalisateur (The Ghostwriter, Rosemary’s baby, The Pianist). A l’époque de Zola, le célèbre...

le 15 nov. 2019

6 j'aime

3

Mademoiselle de Joncquières
Alfred_Babouche
8

La religieuse ou la putain

Sans connaissance de l'oeuvre de Monsieur Mouret, ni du roman de Monsieur Diderot dont seul le titre m'était familier c'est plutôt Monsieur Baer qui m'a attiré vers le cinéma. J'avais envie qu'il me...

le 19 sept. 2018

4 j'aime

1

L'Effondrement
Alfred_Babouche
8

De l'Homme au singe

L’effondrement – série créée par Les Parasites: Y a-t-il toujours un pilote dans l'avion ? A la fin de La Haine (Kassovitz, 1995), la voix grave du narrateur conclue le film en déformant légèrement...

le 9 sept. 2020

3 j'aime