Oppenheimer est un biopic efficace, avec un casting solide et une réalisation de luxe qui sent l'argent. Rien de tout ça ne devrait vous étonner si vous avez suivi la filmographie de Nolan.
Le film est porté par la prestation Cillian Murphy qui habite son personnage avec une belle intensité qui quitte rarement l'écran. Emily Blunt est toujours excellente, mais bien plus effacée. Matt Damon a une moustache et Casey Affleck est aussi flippant et ambigu qu'à son habitude.
Parlons quand même de Rami Malek, qui brille par son absence, et ce n'est pas par accident qu'on a omis son nom sur l'affiche, mais surtout de Robert D. Jr, pour qui j'ai une affection déraisonnable, mais qui nous sert ici un méchant de cartoon assez regrettable.
Il y a quelques fulgurances de mise en scène, quand on se détache un peu de la réalité pour illustrer l'état d'esprit du personnage (le public en flammes, l'adultère), et cela donne lieu aux meilleurs moments du film, à mon sens. Mais ce ne sont que de brefs flashs de ce qu'il aurait pu être s'il n'avait pas suivi sa reconstitution historique de manière aussi scolaire.
Bien construit et rythmé, je ne m'y suis jamais ennuyé, ce qui est en soi un exploit pour un biopic de trois heures. Malheureusement, il fallait visiblement que le film se termine sur un gros twist à la Nolan. Et il semble tellement forcé qu'on se demande si c'était juste un élément du cahier des charges qu'on a fait rentrer dans le script au chausse-pied.
o o o
Si vous ne connaissez pas ce chapitre historique, et les personnalités impliquées, c'est parfois un tantinet difficile à suivre avec 38 noms de personnages à retenir, dont certains qu'on ne verra que deux fois, à deux heures d'intervalle. Parce que des personnages et des acteurs, il y en a un paquet.
Là où le bât blesse davantage, en ce qui me concerne, c'est que malgré sa réussite formelle, mon impression générale en fin de film était de l'ordre du "Tout ça pour ça". Une indifférence polie liée en partie à la froideur de l'oeuvre, l'absence d'empathie envers les personnages et plus généralement d'implication émotionnelle.
Je comprends que pour un public américain, c'est un film important qui relate un pan de l'histoire portant autant de fierté pour toutes les avancées technologiques qu'il représente, que de culpabilité pour le désastreux bilan humain et les implications pour le futur sur lequel plane encore aujourd'hui l'ombre de l'holocauste nucléaire.
C’est passionnant, mais je n'ai pas de lien intime avec ces évènements et rien dans l'écriture du film ou le développement de ses personnages ne m'aide à me sentir plus concerné qu’en regardant un docu de History channel. De temps à autre, le film essaye de créer des effets et me fait des appels du pied, mais moi, l'apparition de Truman ou la référence à JFK, ça m'en touche une sans faire bouger l'autre. Ce que le film me lâche comme un coup de tonnerre finit en pétard mouillé.