Un Prix Jean Vigo, ça interpelle toujours. Ayant pour intention de révéler aux yeux du public un.e cinéaste en devenir, il est fait pour encourager la jeune relève, pour lui faire comprendre qu’on la suit, qu’on croit en elle. Un peu comme la cinéaste, Axelle Ropert, fait avec son personnage principal en fait, la petite Solange, à travers le regard de laquelle est raconté l’histoire, en ne la lâchant pas, en l’écoutant, en la comprenant, en la consolant et en l’encourageant à se relever après être tombée – tout ça pendant que ses parents soit se disputent, soit se regardent le nombril, l’ignorant pas mal.


Ce premier constant dérange d’emblée : des parents aveuglés par leurs problèmes conjugaux au point de ne plus penser à nourrir ni à mettre au lit leur gamine, une mère en manque de confiance en soi ayant besoin que sa fille l’admire (au lieu de l’inverse), un père qui ne pense qu’au cul de la belle Italienne qu’il se tape dans sa boutique : égoïsmes trop excessifs pour être vraisemblable, A. Ropert tombe dans la caricature morale pour mieux desservir le romantisme de son jeune personnage et son innocence face à un monde extérieur trop brutal, gris et déprimant, qui ne la comprend.


On imagine bien qu’il existe vraiment des parents comme ça ; on imagine surtout que c’était beaucoup plus commun il y a une vingtaine / trentaine d’années, alors que l’intérêt pour la parentalité était nettement moindre en comparaison avec aujourd’hui. Axelle Ropert hésite d’ailleurs entre ces deux époques, entre un côté contemporain (portable, Greta, fille qui ressemble à un garçon – ça c’est cool c’est super tendance, c’est Sciamma qui l’a dit) et vintage du 35 mm et du look de P. Katerine (A. Ropert voulant faire le lien entre sa propre jeunesse et celle d’une gamine d’aujourd’hui).


Ce dernier, non pas parce qu’il hérite du rôle d’un beau salaud, déçoit. Ce n’est pas toutefois pas que de sa faute, mais plutôt surtout celle de la réalisatrice et de sa manière de diriger ses acteurs adultes, qui surjouent constamment, dès la première scène (sonnant trop fausse) de l’anniversaire de mariage, jusqu’au dernier repas dans la terrasse de la maison de l’enfance, qu’il va falloir quitter à jamais.


On sent bien que derrière toutes ces maladresses Ropert veut pointer du doigt ceux qui ne pensent pas assez aux gosses, surtout lors des crises conjugales. Mais fallait-il autant être autant caricaturale ?


Marlon_B
6
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le 14 mai 2022

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Marlon_B

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